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bulgare et coupe de biais la Macédoine en traversant les régions presque partout montagneuses et boisées d'Ichtip, Kupurlu, Perlépé, Krouchovo, Monastir et Kastoria.

Les Comités sont certainement plus prêts pour une insurrection qu'ils ne l'étaient l'année dernière à pareille epoque. La veulent-ils? Divers indices pourraient le faire supposer. Ce ne sont de toute part que symptômes d'agitation de la part des Comités hulgares, que symptômes d'inquiétude de la part des autorités turques. Celles-ci ont mêine recours depuis le mois dernier aux bachi-bouzouks dans leurs opérations contre les Bulgares.

Le 26 janvier, le Valy de Monastir, averti que plusieurs chefs des Comités s'étaient réunis à Ekchi-Sou, envoyait le capitaine Rifaat bey avec cent cavaliers pour se saisir des conspirateurs. Au lieu de marcher directement sur Ekchi-Sou, Rifaat boy s'attardait dans les villages voisins à lever deux cents bachi-bouzouks. Les conspirateurs avertis eurent le temps de fuir, mais les habitants du village payèrent pour eux : ils furent battus et cruellement maltraités.

Les bachi-bouzouks se sont cru, après cet enrôlement, autorisés à continuer, même hors de la présence des autorités, à poursuivre les agitateurs bulgares. La police turque accepte du reste leurs services; à la suite de perquisitions opérées par eux dans les villages d'Egri, Boukri, Barechani, Jabeni et Zajetz, trente et un Bulgares ont été incarcérés.

Avant l'arrivée des zaptiés et des autorités turques, les habitants de Jabeni et de Barechani avaient été maltraités, liés d'abord, puis bâtonnés par les bachi-bouzouks. Une plainte adressée au Valy de Monastir par les habitants de Barechani a été repoussée ; quelques bachi-bouzouks du village turc d'Ostritza sont toujours installés à Barechani et, sous l'œil des zaptiés, continuent leurs perquisitions.

Les Turcs de Resna, à cinq heures au nord de Monastir, organisent un Comité antibulgare; près de Resna, sur les bords du lac de Presba, des bandes turques perquisitionnent.

Le village de Krania, du Nahié de Nakolesci, est occupé par une bande de bachi-bouzouks qui, comme à Barechani, ont agi sans ordres et hors de la présence des autorités. Ils ont tellement bâtonné leurs prisonniers qu'il a fallu deux jours pour leur faire faire les quelques heures de route qui séparent Krania de Nakolesci.

Le bruit de ces cruautés s'est déjà répandu dans les villages, elles ont vivement impressionné les populations. D'autre part, les comités surpris semblent arrêtés un instant dans leur action. Leurs agissements avaient jusqu'à présent été facilités par l'inertie plus ou moins achetée de la police. Il n'en est plus de même depuis l'arrivée du nouveau Valy Edib Pacha qui surveille de près les chefs de la police et les oblige à traquer les membres des comités, sans merci.

L'action des comités est encore plus paralysée par la guerre que, dès qu'ils se sont sentis soutenus des autorités, leur ont déclarée les notables grecs et grécisants partout ces derniers se font dénonciateurs des Bulgares. Les autorités grecques de Monastir elles-mêmes ne craignent pas d'encourager ce

mouvement et de prendre le parti des Turcs contre ces mêmes populations chrétiennes qu'elles prétendent devoir un jour revenir à la Grèce.

Cette diminution de l'activité des Comités ne rassure point les Turcs. Ils se montrent très inquiets. Los propriétaires des grands tchiftliks qui, à cette époque de l'année, sont ordinairement dans leurs terres, n'osent quilter Monastir. Dans la ville même, il règne une sorte de terreur: Dès 6 heures du soir, les magasins sont fermés et personne ne peut sortir sans lanterne. A partir de cette heure, du reste, les habitants ne s'aventurent plus dans les

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Le Valy, que je questionnais avant-hier sur la situation générale du Vilayet, me répondait qu'il était sans inquiétudes parce que ses subordonnés faisaient bonne garde, mais que cette vigilance était nécessaire et que les Comités, il le savait, voulaient « tenter un mauvais coup ». Le Comité bulgare du district de Krouchovo, ville sise à huit heures de cheval à l'Est de Monastir, aurait décidé, il y a deux mois, d'enlever ou de tuer un des Consuls de Monastir, dans le but de faire parler en Europe de la question macédonienne.

De renseignements parvenant d'autre source, il résulterait que Sarafof pousse les Comités macédoniens dits « du dedans », qui continuent à reconnaître son autorité, à agir au printemps. Les chefs des Comités sentent approcher le jour où ils devront agir coûte que coûte, sous peine de voir toute leur organisation s'effondrer. Il est certain, d'autre part, qu'à commencer un mouvement sans aucun appui du dehors, les Bulgares macédoniens seraient de suite écrasés. Les bandes seraient-elles mêmes suivies si peu que ce soit par les populations? Rien n'est moins probable. Les chefs des Comités veulent agir quand même. S'ils ne parviennent pas, comme il est probable, à soulever le pays, peut-être pourront-ils augmenter l'agitation et provoquer quelques massacres.

Cette situation n'est pas sans préoccuper mes collègues. Les députations des villages bulgares affluent au Consulat de Russie, autour duquel la police exerce la plus active surveillance.

Les Grecs demandent des mesures sévères contre les Bulgares.

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La propagande serbe, au contraire, ne leur est nullement hostile. Le Consul de Serbie recommande aux députations des villages serbes du Vilayet qui viennent lui demander ses conseils de ne point se laisser enròler par les bandes bulgares, mais d'observer toujours à leur endroit la neutralité la plus bienveillante et même de les aider, en cas de nécessité, à se soustraire à la poursuite des Turcs.

Cette attitude me paraît sage. Trop faible en ces régions, insuffisamment organisée, la propagande serbe se compromettrait inutilement en cherchant à suivre l'oxemple des Bulgaros. Il est cerlain, d'autre part, qu'à s'opposer au mouvèment insurrectionnel bulgare, les Serbes perdraient la sympathie des populations qui, moins patriotes que désireuses d'échapper à leur situation misérable, accueilleront avec joie, quel qu'il soit,leur libérateur.

MAX CHOUBLIER.

!

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M.

Constans, Ambassadeur de la République française à Constantinople,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Péra, le 6 mars 1902.

Votre Excellence a bien voulu me communiquer une lettre du Comte de Vauvineux dans laquelle notre 'Ministre à Belgrade l'entretient des vives inquiétudes que cause dans les milieux diplomatiques l'agitation révolutionnaire signalée dans ces derniers temps en Macédolne et en Vieille-Serbie.

En remerciant Votre Excellence de cette communication, je crois devoir lui faire connaître mon sentiment sur la situation actuelle, qui me paraît de nature à justifier de graves appréhensions. Mon attention n'a pas cessé d'être attirée, depuis le commencement de l'hiver, sur la recrudescence d'activité déployée par les Comités bulgares en Macédoine.

Des conversations toutes récentes que je viens d'avoir avec mes collègues, et entre autres avec l'Ambassadeur de Russie, il ressort que des nou*velles particulièrement inquiétantes leur sont parvenues dans ces derniers temps au sujet des menees des Comités bulgares et macédoniens qui tendraient à fomenter une insurrection pour le printemps. Il est vrai que des bruits de ce genre sont répandus périodiquement chaque année à pareille époque, mais je dois déclarer qu'ils méritent, à mon avis, plus de créance cette année que les précédentes, et que, par suite de la grande extension qu'a pris le mouvement révolutionnaire, il sera peut-être plus difficile cette fois-ci d'en arrêter l'explosion.

Les récents évènements survenus à Ipek ont provoqué une grande effervescence parmi les populations de la frontière. Il n'est pas douteux que de pareils incidents sont de nature à tendre de plus en plus la situation, et que, dans l'état d'esprit où se trouvent chrétiens et musulmans, des éventualités redoutables sont à craindre.

J'aime à espérer que cette fois-ci encore des complications de ce genre, si dangereuses par les conséquences qu'entraine à sa suite toute agitation dans la péninsule des Balkans, pourront être évitées à temps; mais je ne saurais cependant affirmer à cet égard l'optimisme dont j'aurais fait preuve l'année dernière Les symptômes sont plus graves, et me font un devoir d'appeler l'attention de Votre Excellence sur les événements qui semblent se préparer dans ces provinces de l'Empire Ottoman qui réservent peut-être encore à l'Europe bien des surprises et bien des embarras jusqu'au jour de la solution définitive qui décidera de leur sort.

CONSTANS.

N° 5..

Le Marquis de Reverseaux, Ambassadeur de la République française à Vienne,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Vienne, le 9 mars 1902.

Les nouvelles qui nous sont parvenues au Ballplatz sur la situation des Balkans concordent avec celles de nos agents et des agents russes. L'horizon est sombre, et les craintes d'insurrection pour le printemps paraissent plus fondées cette année-ci que d'habitude. Partout on se prépare à la lutte, en Macédoine surtout, où les vexations des autorités turques semblent redoubler. L'Ambassadeur de Russie en a conféré ces jours-ci avec le Comte Goluchowski, et il m'a assuré que l'accord était absolu entre les deux Gouvernements pour imposer autant que possible leur influence en faveur du calme et de la paix. Mais cette influence sera-t-elle prépondérante? Tout dépend d'une étincelle qui mettrait le feu aux poudres, des ordres qui viendront de Constantinople et surtout de la façon dont ils seront compris et exécutés. REVERSEAUX.

N° 6.

M. de la Boulinière, Ministre plénipotentiaire, Chargé de l'Agence et Consulat général de France à Sofia,

à M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères.

Sofia, le 10 mars 1902.

J'ai pris connaissance, avec intérêt, des rapports du Comte de Vauvineux et du marquis de Montebello sur le danger d'un mouvement révolutionnaire en Macédoine; mon attention a été spécialement attirée par les informations de notre Vice-Consul à Monastir, qui semblent prouver que le péril signalé n'est pas chimérique.

De l'agitation qui se manifeste peut-il sortir un soulèvement grave sans un encouragement venant du dehors ? Il est permis d'en douter. La Serbie, écrit M. de Vauvineux, promet d'observer la plus complète réserve, et le Montégro manifeste les mêmes intentions; il est connu que la Grèce est ouvertement hostile à un mouvement qui réveille en elle des regrets et dont elle n'attend rien de bon. Quant à la Bulgarie, elle est absolument calme et la tranquillité lui est nécessaire; aucune formation de bandes, aucun envoi d'armes ou de munitions, aucune menée suspecte ne sont en ce moment tolérés par le Gouvernement et le Commissaire ottoman reconnaît la correction de son attitude. Aucun Gouvernement dans la Péninsule balkanique ne donne donc aido ou encouragement aux agiteurs macédoniens. Le danger ne vient plus d'eux. Le Gouvernement bulgare n'entend pas protéger les Comités macédoniens, dont l'action est dovenue compromettanle. Abandonné à lui-même, le mouvement, mené par la force acquise, à dû prendre une forme nettement révolutionnaire.

Cette évolution était fatale, et c'est de là que viendra un jour le danger, quand l'idée de révolte se sera suffisamment développée en Macédoine. « Nous ne demandons qu'à avoir devant nous 20,000 insurgés pour en finir une bonne fois avec eux, » m'aurait dit le Commissaire ottoman. Une répression turque est pleine de hasards même quand elle est justifiée; toujours périlleuse par ses excès, elle peut avoir des contrecoups inattendus; elle ne clôt généralement pas une question, elle la met à l'ordre du jour.

Νο

M. Delcassé, Ministre des affaires étrangères,

J. DE LA BOUlinière.

à M. le Marquis de Montebello, Ambassadeur de la République française à Saint-Pétersbourg.

Paris, le 13 mars 1902

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Il résulte des derniers rapports de nos Ambassadeurs à Constantinople et à Vienne qu'on a lieu de redouter des troubles prochains dans la Péninsule balkanique. Cette situation est d'ailleurs assez généralement connue, et j'ai eu moi-même occasion d'y faire allusion à la tribune du Parlement à deux reprises.

Vous trouverez, d'autre part, ci-annexé, un aide mémoire officieux qui m'a été remis par l'Ambassadeur de Turquie et qui marque, à un autre point de vue, des préoccupations concernant la situation dans la Péninsule balkanique.

Bien que, d'après votre rapport du 28 février dernier, le Gouvernement impérial parût envisager en dernier lieu avec calme l'avenir prochain dans les Balkans, les symptômes qui nous parviennent de divers côtés confirment l'opportunité des entretiens que nous avons eus récemment avec le Cabinet de Saint-Pétersbourg sur la nécessité de donner des avertissements à la Porte. Nous n'ignorons pas sans doute les précautions extrêmes que comportent toutes les recommandations à formuler à Constantinople en vue de la pacification de provinces ou existent des éléments chrétiens en rivalité avec des éléments musulmans. Nous savons l'abus qui peut être fait de ces conseils par les autorités ottomanes en en prenant prétexte pour exercer d'excessives et injustes rigueurs au détriment de la partie même de la population que nous voudrions protéger. En tout état de cause, les Puissances doivent prévenir toute équivoque à cet égard. Sous-cette réserve, j'attacherais du prix à connaître les réflexions que ne peut manquer de suggérer au Ministre des Affaires étrangères de Russie l'ensemble des informations les plus récentes sur l'état de choses dans la région des Balkans.

DELCASSÉ.

ANNEXE

12 mars 1902.

Le Gouvernement Ottoman est informé que les Comités macédoniens projettent une action prochaine pour la réalisation de leurs visées subversives. Ils auraient l'intention de faire détruire sur plusieurs points les voies ferrées

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