Слике страница
PDF
ePub

et d'acquérir, en l'étudiant, une supériorité sur ceux qui ne l'étudieront pas ».

Que cette idée néfaste de supprimer l'enseignement du droit romain de la préparation des praticiens du droit, ait pour adeptes des hommes qui consacrent leur activité scientifique à l'étude des sciences politiques, du droit public et du droit répressif, tels que MM. Larnaude, Dietz et Prins, cela se conçoit sans peine; car, dans la sphère de leur activité, il est exact que l'étude de l'antiquité classique ne présente qu'un intérêt archéologique, intérêt considérable pourtant, et aucun de ces trois maîtres es-sciences politiques ne songe, j'en suis convaincu, à mécornaître les précieux enseignements puisés dans le Staatsrecht et le Strafrecht de Théodore Mommsen.

L'erreur de ces savants est, à mes yeux, de généraliser une observation qui n'est juste que pourvu qu'on reste confiné dans leur domaine d'élection. A côté du domaine des sciences politiques, il y a le domaine considérable du droit privé, et c'est dans ce domaine-ci que le droit romain a conservé et conservera longtemps encore sa haute signification.

Ceci est tellement manifeste que les attaques dirigées par M. Prins contre le droit romain visent avant tout le droit public et perdent par cela même toute leur force. Quand il se hasarde sur le terrain du droit privé, il s'en tient au droit de famille, qui se rattache bien plus à l'organisation politique qu'au droit civil. Encore ses critiques dans ce domaine font-elles table rase des admirables pages dans lesquelles Jhering détruit la légende si fortement accréditée du cruel égoïsme de l'ancien paterfamilias romain et nous fait le tableau saisissant de ce groupe autonome qu'était la famille romaine, s'épanouissant en pleine liberté sous l'empire exclusif d'une morale austère il est vrai, mais profondément altruiste. En relisant ces pages, M. Prins aurait vu que les mesures législatives destinées à protéger les enfants contre les abus de puissance de parents dénaturés mesures qu'il considère comme d'heureuses et importantes conquêtes modernes n'étaient pas inconnues des Romains, que ceux-ci avaient même été jusqu'à prendre la plus grave de toutes ces mesures, à savoir la déchéance de la puissance paternelle ('). Il aurait vu enfin que cette intrusion de la loi dans l'intérieur de la famille, loin de marquer un progrès dans la civilisation et les mœurs, atteste tout au contraire une dépression morale et rend uniquement

(') Trajan forçait le père à émanciper filium quem male contra pietatem adficiebat, L. 5 D. si a parente quis manumissus sit 37, 12. Une constitution de Théodose et Valen

témoignage de l'impuissance de la morale à enrayer à elle seule comme à la bonne époque de la civilisation romaine tous les abus de la puissance paternelle.

Un point a échappé à l'excellent criminaliste qu'est M. Prins, c'est que, sur le terrain du droit privé, le droit romain n'est pas seulement un remarquable monument archéologique qui nous fournit de précieux enseignements et d'instructifs points de comparaison. Le droit privé des Romains, résultat d'une merveilleuse évolution embrassant les dix siècles qui séparent la loi des XII tables du règne de Justinien, est la source commune d'où procèdent toutes les législations civiles modernes des peuples cultivés. Les points de contact de ces législations modernes, c'est dans le droit romain qu'on les trouve.

Tous les jours, la masse des praticiens, tout autant que l'élite des savants, ressent davantage l'impérieuse nécessité de pénétrer le sens des législations étrangères. La multiplicité et l'enchevêtrement des relations internationales imposent à tous l'étude du droit comparé. Or, dans ces études complexes, quel fil conducteur plus sûr pourrions-nous avoir que le droit romain? Ne constitue-t-il pas, à raison de son influence capitale sur la formation des législations modernes, le véritable droit commun ou jus gentium des peuples cultivés?

Durant les treize siècles et demi qui nous séparent de Justinien, le droit romain n'a pas cessé un instant d'être étudié et appliqué dans l'Europe cultivée. Dans les pays d'Orient, que de siècles n'est-il pas resté en vigueur sous la forme de l'un ou l'autre des remaniements grecs dont la compilation de Justinien fut l'objet en Grèce, c'est encore actuellement le Promptuaire d'Harménopoulos qui constitue la législation civile en vigueur. En Occident, faut-il rappeler ce fait unique dans l'histoire, la réception en bloc du droit romain comme droit commun allemand au XVIe siècle : le droit romain introduit de toutes pièces dans la civilisation allemande sans la moindre crise, par la seule influence des savants et pour sa valeur intrinsèque? De sorte que le droit romain, devenu dès lors partie intégrante du droit national allemand, se trouve renaître aujourd'hui sous une forme nouvelle dans le travail de codification qui vient de doter l'empire d'Allemagne d'un code civil uniforme. En France, le droit romain resté directement en vigueur dans les pays de

tinien, de l'an 428, déclare déchus de la puissance paternelle les pères infâmes qui poussent leurs filles à la prostitution: L. 6 C. de spectaculis et scornicis et lenonibus, 11, 41, et L 12 C. de episcopali audientia 1, 4.

droit écrit (sans parler de son influence capitale sur le droit coutumier), ne se retrouve-t-il pas dans chaque disposition du code civil?

Est-il sérieusement possible de faire abstraction brusquement aujourd'hui de cette tradition ininterrompue dans l'étude et dans l'application du droit romain? Celui-ci n'est-il point devenu par là un facteur primordial de la civilisation moderne? N'est-il pas entré par là dans l'organisme même de notre monde cultivé? N'est ce point là ce qui lui donne pour nous une signification différente de celle des autres droits de l'antiquité? Car ceux-ci, quelle que soit leur perfection technique, ne seront jamais pour nous que d'instructifs documents archéologiques.

Détacher l'étude du droit romain de l'étude du droit civil moderne, c'est essayer d'étudier un fruit sans connaître la plante qui l'a porté, c'est tomber dans l'écueil que M. Prins signale à différentes reprises dans son discours : le verbalisme ou l'empire des mots. Que reste-t-il, en effet, de nos lois civiles si nous les isolons de leur source? Des mots, rien que des mots!

Que M. Prins ne nous réponde pas - empruntant une expression de Nietzsche -, que le progrès est dû « aux géants à la voix éclatante qui, à travers le temps, s'appellent et se répondent au-dessus du murmure confus des pygmées», que dès lors, si ces géants conservent seuls le dépôt de la science des romanistes, l'évolution progressive du droit privé se trouve suffisamment assurée. Dans le domaine des sciences exactes, Nietzsche a mille fois raison les progrès sont dus à l'insaisissable étincelle du génie. Mais combien n'en est-il pas autrement dans le domaine de la législation? N'est-ce point ici la seule activité des pygmées que nos modernes démocraties mettent en œuvre? Quel épouvantable gâchis nous réserverait une génération de pygmées qui ne verrait plus dans notre législation civile que la lettre ou les mots? C'est à ses élucubrations qu'on pourrait assurément appliquer avec mille fois plus de raison les jugements sévères portés sur la glose, à cause précisément de la tendance des glossateurs à s'attacher trop exclusivement à la lettre même des textes. Que nos partisans de la formation d'esprits vraiment modernes par l'ignorance du passé méditent ces paroles de Rabelais, auxquelles l'application de leur néfaste doctrine ne tarderait pas à donner un étrange regain de vérité : « Et disoit aulcunes foys que « les livres des loix lui sembloyent une belle robe d'or, triumphante et pretieuse à merveilles, qui feust brodee de m... car, disoit-il, au

monde n'y ha livres tant beaulx, tant aornez, tant elegans comme << sont les textes des Pandectes; mais la brodure d'iceulx, c'est assavoir

«la glose de Accurse, est tant salle, tant infame et punaise, que ce n'est qu'ordure et villennie. »

GEORGES CORNIL.

NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES

27. Derecho diplomatico y consular, con los últimos casos de controversias entre los Estados, por ALEJANDRO GUESALAGA, enviado extraordinario y ministro plenipotenciario de la Republica Argentina en Bolivia. 1 volume in-8° de XVI-393 pages; Buenos-Ayres, Peuser, 1900.

«

A l'époque où il était à Berlin premier secrétaire de la légation argentine, M. Guesalaga avait déjà publié, sur les agents diplomatiques, leurs fonctions et leurs immunités, un excellent petit volume qui résumait avec soin les principales données de la science sur ce point spécial du droit international. M. Guesalaga a continué ses études sur le sujet et, parvenu au plus haut grade de la carrière diplomatique dans son pays, il nous donne aujourd'hui, avec sa grande expérience professionnelle, un fort volume dans lequel il aborde, avec tous les développements nécessaires et avec les << illustrations » résultant des incidents diplomatiques contemporains, les divers problèmes qui se rattachent de près ou de loin à la représentation diplomatique ou consulaire à l'étranger. L'auteur a pris les mots Droit diplomatique et consulaire dans leur sens large. Il traite non seulement des agents, de leur mode de recrutement, de leurs devoirs professionnels et de leurs droits spéciaux, mais encore, d'une façon plus générale, de l'exterritorialité, et même de la neutralité, de l'arbitrage international, des différends entre Etats, de la guerre entre l'Espagne et les États-Unis, de l'extradition, etc., dont le rapport direct avec le droit diplomatique et consulaire n'apparait pas au premier coup d'œil. Personne ne songera à se plaindre de cette extension donnée au titre du livre, puisque, sans nuire le moins du monde à l'examen des questions qu'il renferme par essence, elle nous vaut plusieurs chapitres du plus vif intérêt sur des matières délicates qui sont partout à l'ordre du jour et que M. Guesalaga, en sa qualité de diplomate, connaît mieux que personne; nous signalerons tout particulièrement, à ce point de vue, les deux chapitres sur l'arbitrage et les différends contemporains, qui rappellent et résument, en quelques lignes ou quelques pages, les cinquante ou soixante affaires litigieuses internationales de ce dernier quart de siècle. L'auteur n'a pas, d'ailleurs, sur la « panacée » de l'arbitrage beaucoup plus d'illusions que la plupart des jurisconsultes et publicistes compétents. Le nouvel ouvrage que nous annonçons classe définitivement M. Guesalaga dans la pléiade des internationalistes très distingués qui honorent la République Argentine, et dont les chefs de file sont nos éminents confrères, MM. Calvo et Alcorta. ERNEST LEHR.

« ПретходнаНастави »