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sous le dernier règne par le surnom de Kouyoudgi, ou le faiseur de puits. Le réiseffendi était cet Ismaël-Bey, qui, tranquille au milieu des défaites des armées ottomanes, se consolait du malheur où sa nation pouvait être réduite en repassant le Bosphore, par l'idée que sur la côte d'Asie il y avait des vallons délicieux où l'on pourrait rebâtir de jolis kiosks. Ce ministre insouciant et épicurien, qui aimait les fleurs, les femmes, les serins et l'opium, suivit la fortune du caïmacan, et fut relégué dans l'île de Scio.

Il en fut de même d'Ised-Bey, le surintendant de la monnaie, favori de sultan Mustapha. Ces deux derniers ministres unissaient à l'aménité des mœurs quelque esprit, du jugement, et des connaissances sur les intérêts des puissances de l'Europe; mais leur perte n'eût intéressé ni la gloire, ni la prospérité de l'empire, si leurs successeurs n'avaient pas offert des vices de plus et leurs qualités de moins. Abdi-PachaKouyoudgi n'abusa pas long-tems de la faveur d'un maître aussi faible que bien intentionné. Sur les plaintes des gens de loi, il fut déposé et exilé en Natolie: il y fut restitué aux seules fonctions qui convinssent à un homme d'un caractère ferme, mais trop sanguinaire. Il eut

la mission de parcourir ces provinces, et de les purger des brigands que la guerre avait multipliés. Ised-Pacha, par un retour de fortune, fut mis à sa place.

Pendant que ces intrigues et ces changemens agitaient le sérail et occupaient le sultan, le graud-visir Moussou - Oglou demeurait à la tête de l'armée ottomane, plus inquiet de l'issue de la guerre que jaloux de la continuer. AbdulHamid, ami du repos, mais sensible à l'honneur de son trône, n'en ordonna pas moins des préparatifs immenses. Le peu d'activité et de constance qu'il avait reçu de la nature, il les mit à protéger et à encourager par sa présence les établissemens militaires formés par le baron de Tott, sous les auspices de sultan Mustapha. Il vint assister en personne aux manœuvres d'artillerie, aux évolutions du petit nombre de soldats qu'on exerçait à l'européenne dans les prairies, de Kinsthana. Enfin, par ses ordres et ses soins, une armée ottomane de quatre cent mille hommes se trouva réunie sur la rive droite du Danube

Catherine II semblait loin de pouvoir atta quer des forces aussi imposantes. L'armée de Romantzof, affaiblie par ses revers récens, et même par ses succès passés, sentait la difficulté

de se recruter dans des pays aussi éloignés de l'empire russe; elle était réduite à un état déplorable. Pour surcroît de détresse, la révolte la plus alarmante éclatait dans l'intérieur de la Russie. Le fameux Pugatschef, à la tête de plusieurs milliers de Tartares, s'avançait vers Moscow, le fer et la flamme à la main. Pugatschef reconnu, par une multitude crédule, féroce et sauvage, pour l'empereur Pierre III, échappé par miracle aux mains de son assassin n'avait qu'à profiter de ses succès pour changer le sort de la Russie. Catherine II, qui ne se montrait jamais plus grande que dans les extrêmes périls, sut envoyer tout à la fois des troupes contre le rebelle Pugatschef, et des renforts à Romantzof, avec l'ordre de reprendre l'offensive la fortune la fit triompher en même tems de tous ses ennemis et de tous ses dangers. Romantzof tenta une troisième fois le pas 1774. sage du Danube, dont la largeur est, près de Silistria, de plus d'un demi-mille, Les Russes, commandés par Solticof, abordèrent sur la rive droite, et s'y maintinrent malgré la vigoureuse défense qu'ils rencontrèrent. Quatre régimens anglais, aux ordres du général Loïd, étaient réunis à cette colonne. Les généraux Suvaroff et Kamenski les suivirent de près, et toute l'ar

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mée russe campa aux portes de Silistria, que depuis deux campagnes les deux armées ne cherchaient qu'à emporter ou à défendre. Les Ottomans vinrent attaquer les Russes avant de leur avoir laissé le tems de se retrancher, et firent tout ce qu'il était possible d'attendre du nombre et de l'intrépidité. Mais la discipline et la tactique des soldats de Catherine triomphèrent de nouveau de ces efforts aveugles et mal dirigés. Pendant que Soltikof résistait, Kamenski et Suwaroffattaquèrent un corps de vingt mille hommes, commandés par le réis-effendi, et qui amenait un convoi de quatre à cinq mille chariots : les Musulmans furent mis en déroute, les chariots brûlés, et l'artillerie prise. Ce malheur fut suivi d'un malheur plus grand encore. Moussou-Oglou, campé à Shiumla, avec la principale armée, avait fait la même faute que Marlborough et le prince Eugène à Denain: ses quartiers étaient trop éloignés pour se soutenir entre eux. Romantzof, avec autant d'audace que de succès, s'avança par les intervalles il tourna les positions de MossouOglou, et se plaçant entre son camp'et Varna, il lui coupa ainsi toute communication avec ses magasins. Les Musulmans, stupéfaits d'une manœuvre aussi inattendue, furent saisis d'une ter

reur panique : ils se révoltèrent partout à la fois; on les vit s'égorger entr'eux, s'enfuir par troupe, se diperser sans connaître de chefs. De toute cette formidable armée, douze mille hommes au plus restèrent autour du visir et de l'étendard de Mahomet. Moussou-Oglou, dans cette extrémité, ne pouvant ni être secouru, ni se retirer, ni combattre, envoya prévenir le sultan d'un événement aussi étrange, et dont son sublime empereur ne pouvait pas le rendre responsable. Moussou-Oglou avait épousé une sœur de Mustapha III : cette princesse appaisa l'indignation d'Abdul-Hamid, justifia l'imprévoyance du grand-visir, et pour sauver la dignité du trône, fût-ce aux dépens du nom ottoman, le muphti rendit un fetfa qui déclarait : « que le grand-visir ne pouvait pas vain>> cre sans soldats, et que puisque son armée » l'avait abandonné, le saint prophète ordon»> nait qu'il fit la paix. »>

Romantzof n'était pas encore instruit de tout ce qu'il avait à espérer d'un tel état de choses; il se préparait à donner l'assaut au camp ottoman qui, toujours fortifié, ressemble partout à une place de guerre, lorsque le kiaia de Moussou-Oglou vint demander la paix. Le fier ottoman, humilié de se souvenir que, quelques

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