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Domaine des lacs, des mers territoriales et des fleuves. 1)

§ 77. Les lacs et les mers purement territoriales 2) sont une propriété incontestable de l'État ou des plusieurs États dont ils sont enclavés, et dans les limites indiquées au § 66. Il n'est pas moins certain que l'empire d'un État s'étend sur le cours des fleuves qui passent par son territoire, jusqu'à leur embouchure, c'est-à-dire, jusqu'aux points extrêmes des rivages où leurs eaux quittent le territoire, dussent-elles se confondre déjà d'avance avec celles de la mer dans un bassin plus vaste que celui qui est propre à la nature des fleuves. ") Les lacs mêmes qu'elles forment dans le voisinage immédiat de la haute mer font encore une partie du territoire, surtout lorsqu'ils sont protégés par quelque langue de terre ou par des îles, 4) comme l'ancien et le nouveau Haff et celui de Courlande. On pourra en dire autant des lacs aux embouchures de fleuves qui sont dilatés par les irruptions de la mer du Nord dans les terres Frises, ainsi que le Zuydersée et la Jahde, qui couvrent d'anciennes terres fermes.

Si le fleuve parcourt ou baigne plusieurs territoires, les États riverains se trouvent dans une communion naturelle à l'égard de la propriété et de l'usage des eaux, sauf la souveraineté de chaque État sur toute l'étendue du fleuve depuis l'endroit où il atteint le territoire jusqu'au point où il le quitte (§ 66). Aucun de ces États ne pourra donc porter atteinte aux droits des autres; chacun doit même contribuer à la conservation du cours d'eau dans les limites de sa souveraineté et le faire parvenir à son voisin. De

1) Comparez sur cette matière la dissertation très-intéressante de M. Karatheodory: Du droit internat. concernant les grands cours d'eaux. Leipz. 1861. Engelhardt, Du régime conventionnel des fleuves internationaux. Paris 1878. Calvo I, § 258-294.

2) [G. telles que la mer Caspienne; par le traité de Gulistan (1813), la Perse renonça au droit d'y maintenir des bâtiments de guerre.]

3) Jacobsen, Seerecht p. 583. [G. Cependant un État non en possession des deux rives peut avoir la souveraineté sur tout le domaine d'un fleuve par suite d'une possession immémoriale ou d'un traité, p. ex. pour le premier cas, Hambourg et Brème sur l'Elbe et le Weser (cf. Die Freiheit der Elbschifffahrt. Hamburg 1880) et pour le second cas la Suède sur l'Oder par la paix de Westphalie et la Prusse sur la Netze (1773) V. Martens, Rec. I, p. 490.] 4) Une contestation sur les îlots à l'embouchure du Mississippi est rapportée par Wheaton, Elem. I, 2. 4. § 7.

Heffter, droit international. 4° éd.

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l'autre part chacun d'eux, de même que le propriétaire unique d'un fleuve, pourrait,,stricto jure" affecter les eaux à ses propres usages et à ceux de ses regnicoles, et en exclure les autres. Mais le concert européen n'est pas resté dans cette exclusion. Premièrement un fleuve qui serait une voie de communication indispensable pour la subsistance d'une autre nation ne pourrait lui être fermé (§ 32. III). Outre cela on reconnaît avec Grotius, Pufendorf et Vattel, au moins en principe, un droit beaucoup plus étendu, celui d'usage et de passage innocent, lequel ne peut être refusé absolument à aucune nation amie et à ses sujets dans l'intérêt du commerce universel. 3)

En effet les traités de Paris et de Vienne de 1814 et de 1815 y ont pourvu positivement en sanctionnant à ce sujet des règles communes à toutes les nations de l'Europe et qui se résument dans les propositions suivantes: ")

1o La navigation sur tous les fleuves qui, dans leur cours navigable, séparent ou traversent plusieurs États, est libre jus

5) V. Weathon, Intern. Law I, 2. 4. § 12. 18. 19 et son Histoire du droit des gens II, p. 191 suiv. surtout les discussions intéressantes au sujet de la navigation du Mississippi et du St. Laurent.

6) Traité de Paris 1814, art. 5. Acte final du Congrès de Vienne art. 108-117 et 118. Décret de la Diète Germanique du 3 août 1820. V. l'historique des négociations dans Klüber, Actes du Congrès de Vienne. t. III. Le Baron Guillaume de Humboldt a présidé aux travaux du comité international, chargé de cette tâche par le congrès. V. aussi Wheaton, Histoire des progrès p. 388 suiv. (II, 184). [G. L'idée capitale de ce comité était de créer pour chacun des cours d'eau qui traversent plusieurs États une véritable association riveraine appelée à traiter les eaux communes comme un domaine indivis soumis sur toute son étendue navigable à un système administratif uniforme. L'Angleterre repoussa les prétentions des États-Unis demandant la libre navigation sur le St. Laurent, en se basant sur le fait que les dispositions du traité de Vienne ne s'appliquaient qu'aux fleuves conventionnels. Hall nie encore le droit des riverains de naviguer sur toute l'étendue d'une rivière qui traverse plusieurs territoires et dit que si un État force l'ouverture de la partie d'un fleuve située entre lui et la mer, il viole le droit tout comme un individu qui passe par le champ d'un voisin pour arriver à la grande route. Il nous paraît oublier la différence qu'il y a entre l'eau et la terre. Les fleuves, a dit Pascal, sont des chemins qui marchent, la rivière change à chaque moment et est formée par tous ses confluents, les abus du passé ne prouvent rien, la liberté de navigation a triomphé partout, sur le Laurent elle a été accordée par l'art. 27 du traité de Washington 1871; celle du Danube par le traité de Paris de 1856.]

qu'à leur embouchure dans la mer, 7) et ne peut être interdite en fait de commerce à personne.

2o Les États riverains exercent les droits de souveraineté des rivières qui parcourent leurs territoires, sans porter le moindre préjudice à la liberté de la navigation. En conséquence on ne peut plus établir des entrepôts et des lieux de transbordement forcés, et ils ne peuvent être conservés qu'autant qu'ils sont utiles à la navigation et au commerce. 3o La fixation des droits de navigation est indépendante de la valeur et de la qualité particulière des marchandises: le montant de ces droits ne doit jamais dépasser le „maximum“ fixé au mois de juin 1815;

4o La police de la navigation des fleuves doit être réglée d'une manière uniforme, et fixée d'un commun accord, sans pouvoir être changée par un seul des États riverains. Ils sont tenus de veiller à l'entretien des rivages et du lit des rivières, des chemins de halage etc.

Ces principes généraux ont été, par des conventions spéciales, appliqués à plusieurs des fleuves principaux de l'Europe. ")

Le traité de Paris du 30 mars 1856 les a de nouveau reconnus en stipulant qu'à l'avenir ces principes seront également appliqués au Danube et à ses embouchures. A cet effet il a établi une commission européenne et une commission riveraine permanente. La première est chargée de désigner et de faire exécuter les travaux nécessaires pour dégager les embouchures du Danube, ainsi que les parties de la mer y avoisinantes, des sables et autres obstacles qui les obstruent, afin de mettre cette partie du fleuve et lesdites parties de la mer dans les meilleures conditions possibles de navigabilité. La seconde, composée des délégués de l'Autriche, de la Bavière, de la Sublime Porte et du

On peut lire dans Klüber, Oeffentl. Recht des deutschen Bundes § 571. not. d., et dans Wheaton, Histoire II, 189, le récit du litige qui a surgi entre le Gouvernement des Pays-Bas et les autres États intéressés dans la navigation du Rhin, sur l'interprétation de l'expression jusqu'à la mer" insérée dans l'Acte final de Vienne, litige qui fut enfin décidé par la convention conclue à Mayence en 1831 entre tous les États riverains. La navigation du Rhin y fut déclarée libre depuis le point où il devient navigable jusque dans la mer „bis in die See." Martens, Nouv. Rec. IX, 252. Phillimore I, 237.

*) V. aussi l'article intitulé: la Hollande depuis 1815, publié par M. Bergson, le premier traducteur du présent ouvrage, dans la Revue des deux Mondes 1851, octobre p. 45.

Wurtemberg, devait élaborer les règlements de navigation et de police fluviale, faire disparaître les entraves, de quelque nature qu'elles soient, qui s'opposent encore à ce que les dispositions du traité de Vienne soient appliquées au Danube, ordonner et faire. exécuter les travaux nécessaires sur tout le parcours des fleuves, et veiller, après la dissolution de la commission européenne, au maintien de la navigabilité des embouchures du Danube et des parties de la mer y avoisinantes. ")

Il est vrai que les conventions particulières ne se trouvaient pas partout en conformité avec les principes du Congrès de Vienne. 10) Les intérêts individuels des États riverains et de leurs sujets s'opposaient à une libre concurrence de la navigation de toutes les autres nationalités même en fait de commerce. les principes ont fini par vaincre le particularisme.

Mais

Des navires et des droits de navigation en pleine mer. § 78. Les navires d'une nation naviguant sur la haute mer sont regardés comme des portions flottantes de son pays, ou, pour

9) [G. Les dispositions des art. 53-55 du traité de Berlin du 13 Juillet 1878 sur la navigation du Danube n'ont pas été heureuses, parcequ'elles s'écartent du principe inauguré en 1815 et déclaré obligatoire pour le Danube en 1856. Elles impliquent, en effet, trois systèmes administratifs différents: l'un dirigé par une commission européenne sur la partie maritime située en aval de Galatz, l'autre placée sous la surveillance d'une commission riveraine sur la section moyenne de Galatz aux Portes de fer et le troisième abandonné à la discrétion des États supérieurs, de l'Autriche-Hongrie, de la Bavière et du Wurtemberg. Cette division n'a pas manqué de donner lieu à de regrettables différends, dont on attend encore la solution. Pour appliquer l'art. 55 du traité de Berlin, la commission européenne a proposé d'instituer un syndicat spécial, qualifié de commission mixte, présidée par l'Autriche, qui aurait à pourvoir à l'exécution des règlements visés par le traité de Berlin et dans lequel l'Autriche, la Roumanie, la Serbie et la Bulgarie seraient représentées chacune par un délégué. La Roumanie s'oppose à cette disposition parceque le traité ne dit mot d'une commission mixte. Cf. Valérian, L'Autriche et la Roumanie dans la question du Danube. Jassy 1882.]

10) C. F. Wurm, Fünf Briefe über die Freiheit der Flussschiffahrt. Leipz. 1858. Karatheodory p. 108. [G. Il suffit de citer l'interprétation absurde que la Hollande donna aux mots „jusqu'à la mer" (Calvo § 262-64). L'acte de navigation de l'Elbe de 1821 était en contradiction manifeste avec les principes de Vienne; le Hanovre refusa de soumettre le péage de Stade à la compétence de la Commission, prétendant que c'était un péage de mer. Ce ne fut qu'en 1843 que ce péage fut réglé; en 1861, il fut supprimé par voie de rachat. Le péage de l'Escaut fut également racheté en 1863.]

nous servir de l'expression des jurisconsultes français, comme la continuation ou la prorogation du territoire. Les publicistes anglais ont combattu vainement cette idée comme étant une fiction arbitraire, et peut-être aussi parce qu'elle était peu favorable à la jurisprudence de la Grande-Bretagne concernant la navigation des neutres. 1) Nous y reviendrons dans le livre suivant.

L'équipage d'un navire forme une société spéciale jouissant de la protection de l'État auquel elle appartient, et continuant à être régie par ses lois, même pendant son séjour dans les eaux étrangères. Les enfants des regnicoles nés à bord d'un navire sont regardés comme sujets de l'État. Sur ce point encore la jurisprudence anglaise s'est éloignée du principe généralement suivi, et ne regarde comme sujets que les enfants nés dans les eaux britanniques. Les lois particulières de chaque État règlent

le mode de constatation de la nationalité des navires.

La juridiction que tout État souverain exerce sur la navigation dans les limites de son territoire, comprend les droits suivants, savoir:

I. Le droit de faire des règlements qui déterminent les modes

1) [G. La pratique et la doctrine anglaises étaient certainement contraires au droit, en tant qu'elles s'arrogeaient le droit de visiter des bâtiments étrangers sur la haute mer même en temps de paix sans aucun autre motif que celui de l'intérêt britannique (§ 80). Mais la fiction de la territorialité des bâtiments en mer n'est strictement applicable qu'aux vaisseaux publics, qui seuls jouissent de l'inviolabilité absolue vis-à-vis des gouvernements étrangers. Les bâtiments de commerce non seulement sont soumis à la juridiction locale lorsqu'ils entrent dans un port étranger, mais s'ils y commettent une infraction aux lois nationales, ils peuvent être poursuivis sur la haute mer. Du reste on n'a pas besoin de cette fiction pour établir la juridiction de chaque État sur ses navires en mer. Libre de toute souveraineté territoriale, la mer ne peut être libre de toute souveraineté juridique, car autrement tout crime pourrait s'y commettre impunément, et, à défaut d'une juridiction locale, celle de l'État d'origine du bâtiment est la seule admissible. Même les étrangers naviguant sur un bâtiment sont sujets aux lois nationaux, comme s'ils séjournaient dans le territoire du pays. (Décrets du tribunal suprême prussien du 12 sept. 1855 et du tribunal impérial allemand de commerce du 27 avril 1872.) Les navires de commerce sur la haute mer ne sont donc soumis qu'aux vaisseaux publics de leur État, un autre État n'y a aucun droit vis à vis d'eux en temps de paix, excepté les cas de défense légitime contre une agression, les cas de piraterie, et, en temps de guerre, la saisie pour contrebande et rupture du blocus. L'État d'origine doit par conséquent à ses bâtiments et à leur équipage la protection qu'il accorde à ses nationaux; de même il est responsable vis à vis des autres États de tout acte illégitime du navire et de son équipage.]

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