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Mesures extraordinaires des belligérants à l'égard
des neutres.

§ 174. Les belligérants ne se sont pas toujours contentés des mesures ordinaires. Déjà nous avons eu l'occasion de nous

gument de Hautefeuille, disant que le neutre qui s'est rendu coupable d'une violation du droit maritime international, se trouve en état d'hostilité et qu'ainsi il est soumis de droit à la juridiction du belligérant, s'il tombe dans ses mains (Droits et devoirs III, 291) pèche déjà par cela seul que la question de savoir si les sujets neutres se sont rendus coupables d'une violation du droit des gens ne peut être résolue que par l'arrêt du juge. Les tribunaux des prises sont en effet une institution très-imparfaite. Toutes les déclarations de Mansfield, Scott et Story, exposant que ces tribunaux sont internationaux par la mission dont ils sont investis parce qu'ils ont pour tâche unique de juger conformément au droit des gens et appartiennent aussi bien au neutre qu'au belligérant, ne peuvent leur conférer aucun caractère international ni offrir aucune garantie contre leur partialité. Malgré toute la sagacité des juges et malgré leurs efforts pour être impartiaux le fait subsiste que les cours des prises jugent dans leur propre cause et se conforment toujours à leur interprétation particulière du droit international dans leurs jugements sur des sujets étrangers, auxquels l'État belligérant impose la charge de fournir des preuves satisfaisantes pour établir son droit d'exemption de la saisie. Mais à l'égard de ces derniers on ne peut invoquer le forum delicti; on peut seulement faire valoir le forum deprehensionis, lequel, puisque la mer appartient à toutes les nations, ne devrait pas conférer le droit de juridiction exclusivement au tribunal d'une nation. De plus ils n'offrent les garanties d'une observation des formes judiciaires qu'en Angleterre et aux États-Unis, tandis que sur le continent les questions de prises se traitent plutôt comme affaires d'administration contentieuse. C'est pour cette raison que Sir Travers Twiss, qui est opposé à toute innovation dans ce domaine, a pourtant reconnu, dans son Mémoire lu à Anvers en 1877 devant l'association pour la réforme du droit de gens, que les tribunaux des prises sont, au point de vue de leurs relations avec les neutres, des anomalies dans la jurisprudence moderne. Il a aussi reconnu que les juges de ces Cours ont souvent l'habitude de raisonner par analogie, d'invoquer des fictions de droit, et de faire tomber ainsi un cas nouveau sous le coup de quelque précédent admis. Les décisions souvent inouïes des juges anglais dans les guerres de l'empire et des juges américains dans la guerre de sécession, en font preuve. Par contre, les tribunaux des neutres n'offrent pas une plus grande garantie d'impartialité. L'Angleterre était tout aussi bien en droit de s'opposer à ce qu'une commission prussienne décidât si des navires prussiens avaient violé la neutralité en transportant certains articles en France. C'est pour ces raisons et notamment par suite de l'exagération des droits des belligérants de la part de l'Angleterre, qu'on songea dès le siècle passé à chercher un biais. Dans un écrit de la saisie des bâti

expliquer sur quelques-unes de ces mesures normales moins

ments neutres" 1759, II, 21, le publiciste danois Hübner se prononça pour l'établissement de commissions internationales mixtes appelées à juger ces différends. Cette pensée fut à peine prise en considération. Elle a été reprise de nos jours et vivement recommandée, p. ex. par Trendelenburg, Lücken im V.-R. p. 49, et par Gessner, Kriegführende und neutrale Mächte 1877 p. 52; mais ni l'un ni l'autre n'entrent dans des détails sur les moyens qu'ils proposeraient pour la mettre à exécution. L'Institut de dr. intern. s'acquitta de cette tâche en chargeant M. M. Westlake et Bulmerincq de lui présenter un rapport. Le premier proposa une juridiction internationale qui a uniquement trait à la seconde instance et ne s'applique qu'aux saisies opérées sur les neutres. La proposition de M. Bulmerincq au contraire propose un tribunal international commun aux belligérants et aux neutres tant pour la première que pour la seconde instance (XI p. 181). L'Institut s'est en conséquence prononcé pour les réformes suivantes: 1) Les principes généraux du droit des prises seront formulés par une convention internationale; 2) les tribunaux actuels seront remplacés par des tribunaux internationaux qui donnent plus de garantie d'impartialité aux sujets intéressés de l'État neutre ou pacifique; 3) il faudra s'entendre sur une procédure commune. Plusieurs propositions relatives à l'établissement de ces tribunaux internationaux ont été présentées et discutées par Bulmerincq; il regarde lui-même la combinaison d'une juridiction des belligérants et des neutres" comme l'unique solution du problème de l'organisation du droit des prises" (p. 171). Cette solution, il la trouve dans un tribunal composé de trois juges pour la première instance comme pour l'appel; chacun des deux belligérants nomme un juge et le troisième est désigné par un État neutre; ce tribunal juge toutes les affaires des belligérants et des neutres. Dès qu'une guerre éclate, tous les États neutres seront invités par les belligérants à élire l'État neutre qui doit nommer le troisième juge, à moins qu'une convention internationale ne désigne une fois pour toutes la Belgique à cet effet; le tribunal devrait alors siéger dans ce dernier pays. Il est certain qu'un tribunal de ce genre offrirait aux neutres une tout autre garantie d'impartialité que les tribunaux actuels, mais, comme dans ce tribunal le juge neutre aurait toujours voix décisive, les grandes puissances maritimes qui en tant que puissances belligérantes entrent principalement en considération, n'accéderont certainement pas à cette combinaison, sans compter que cela nécessiterait une profonde modification de leurs lois, de leur constitution, comme aux États-Unis où l'art. III, 12 de la constitution réserve tous les cas de la juridiction maritime à la compétence de la Cour Suprême et des tribunaux qui lui sont subordonnés. En outre, les difficultés pratiques que ces tribunaux internationaux auraient à surmonter, seraient considérables. Dans les guerres d'une longue durée entre des puissances qui, comme l'Angleterre, possèdent dans les parties du monde les plus diverses des ports où les prises peuvent être amenées, il ne serait guère possible de juger tous les cas à Bruxelles sans entraîner des lenteurs de la plus haute gravité. Un pareil tribunal ne pourrait se comparer même de loin au bureau de l'union postale universelle de Berne.

onéreuses, auxquelles le commerce s'est vu parfois assujetti, telles que l'embargo mis sur les navires neutres pour voiler certains buts politiques; la mise en réquisition des navires ou des cargaisons neutres pour des transports de troupes, pour des besoins momentanés ou imminents. Nous avons indiqué les limites rigoureuses de ces diverses mesures (§ 150). Ajoutons-y encore le blocus de rivières communes à l'autre belligérant et à des puissances neutres, à la faveur desquelles des modifications du moins devraient être admises aux rigueurs du blocus, ce qui n'a pas lieu toujours.

Les restrictions apportées par l'un des belligérants à la

Bulmerincq lui-même attache avec raison une importance particulière à un droit des prises commun à toutes les nations; la question est en effet moins une question de procédure qu'une question de droit positif et matériel. Si la juridiction des prises est aujourd'hui fort simplifiée par la Déclaration de Paris, elle le serait encore bien davantage, si la liberté de la propriété privée était assurée et si les États s'entendaient sur les principes communs à appliquer à la contrebande et au blocus. Pour les réclamations des neutres il ne restera d'ailleurs que les commissions de révision et les tribunaux d'arbitrage, qui vérifient la légalité des jugements rendus par les tribunaux des prises. C'est ainsi que l'Angleterre paya à la Prusse 20,000 livres sterling après le traité de Westminster (1756), la France 25 millions de francs aux États-Unis en 1831. Ceux-ci établirent avec l'Angleterre une commission (1794) pour juger les prétentions élevées contre cette dernière puissance par des citoyens américains lors de la guerre entre l'Angleterre et la France; une autre commission semblable en 1854 pour toutes les réclamations de leurs nationaux respectifs, qui étaient restées pendantes depuis la paix du 24 décembre 1814, et en 1871 les art. 12-17 du traité de Washington instituèrent un tribunal d'arbitrage pour les réclamations élevées pendant la guerre de sécession. Enfin une convention a été conclue en 1882 entre les États-Unis et la France réglant les réclamations issues de la même guerre. Les objections en elles-mêmes fort justes que Bulmerincq fait valoir contre la justice administrative" des commissions ne peuvent pas même s'appliquer au tribunal du traité de Washington; si ce tribunal d'arbitrage a confirmé presque toutes les décisions américaines, entre autres des jugements aussi manifestement injustes que celui du Springbok, la même chose pourrait se passer dans le tribunal international que l'on propose, car personne ne peut répondre de la capacité du troisième juge neutre. Mais ce qui paraît possible, c'est de régler par convention internationale les trois phases de la procédure que Mr Bulmerincq distingue très-bien: 1) l'arrêt, la visite et la conduite du navire ou des marchandises saisies dans le port du belligérant; 2) les formalités à l'arrivée dans le port; 3) la procédure devant le tribunal de première et de seconde instance. On fixerait ainsi d'une manière uniforme les devoirs du croiseur et du capteur, l'instruction préparatoire et les garanties offertes aux neutres par la procédure du dit tribunal, lequel devrait toujours avoir une organisation judiciaire.]

liberté du commerce neutre, sous prétexte de la nécessité de réduire l'ennemi, qualifiées d'extraordinaires, sont d'une nature plus grave. Au nombre de ces restrictions on doit ranger: 1o L'augmentation arbitraire de la liste des articles de contrebande, et cela sans aucune indemnité accordée, par la voie connue sous le nom de droit de préemption (§ 161);

2o la défense faite aux neutres de tout commerce d'objets ennemis, ou bien la défense de fréquenter les ports de l'ennemi et ceux qu'il fréquente;

3o la défense de communiquer avec l'ennemi et avec le territoire ennemi.

L'histoire moderne a eu à enrégistrer plusieurs exemples de pareilles excentricités. Ce fut le système imaginé par la Coalition qui voulait réduire par la famine la France révolutionnaire, système soutenu surtout en 1793 par l'Angleterre, malgré la résistance des puissances neutres. Plus tard il reparaît sous la forme du blocus continental, dont nous avons déjà indiqué l'étendue énorme au § 152.

Les cas qui seuls peuvent légitimer le recours à des mesures aussi rigoureuses, sont:

1o lorsqu'on défend sa propre indépendance contre un ennemi plus puissant;

2o lorsqu'on est en guerre avec un ennemi du genre humain ou de tous les États, notamment dans une guerre contre un

souverain qui voudrait établir une monarchie universelle. Les neutres de leur côté peuvent repousser ces mesures: 1o lorsque les belligérants ne sont pas en état de justifier de motifs suffisants pour en légitimer l'emploi;

2o lorsque ces actes compromettent l'existence des puissances neutres;

3o lorsqu'ils entraînent après eux l'emploi de procédés inhumains ou barbares.

Dès qu'il n'est pas possible aux puissances neutres de s'entendre à cet égard avec les belligérants, elles ne doivent consulter que leurs intérêts et leurs forces. Si, malgré toutes les représentations, les belligérants persistent dans leur système, les neutres n'ont que le choix entre la guerre et la soumission. Il n'existe aucun autre moyen pour vider un pareil conflit.

Toute puissance neutre a incontestablement le droit de prendre des mesures convenables contre des procédés contraires aux usages

internationaux, ainsi que contre des excès arbitraires qui les menacent, de défendre ses prétentions légitimes à main armée et de faire usage de représailles contre les empiètements des belligérants.

Un moyen de sûreté parfaitement juste, c'est l'escorte de navires marchands par des bâtiments de guerre (§ 170). C'est un usage qui a été pratiqué déjà beaucoup par la ligue hanséatique. L'Angleterre elle-même qui, pendant la guerre du nord, avait envoyé, par suite des pertes éprouvées par les corsaires suédois, une escadre dans les mers septentrionales pour la protection de son commerce, ne saurait contester aux autres nations le droit de faire convoyer leurs navires de commerce.

Un autre moyen c'est l'établissement d'une force armée pour le maintien des principes de neutralité. Tel fut le but de la neutralité armée du Nord, fondée sur la déclaration faite par les puissances membres de cette coalition, suivant laquelle la mer Baltique devait être considérée comme fermée aux vaisseaux de guerre des belligérants et à l'abri de toute espèce d'hostilités, ce qui ne manqua pas de contestations, notamment de la part de l'Angleterre, qui renouvela encore ses protestations par un acte du 18 décembre 1807. (v. § 145 N. 4 G.)

Enfin les neutres qui admettent indistinctement dans leurs ports les bâtiments de guerre des belligérants avec une impartialité, une égalité parfaite, pourraient, par réciprocité, stipuler en leur faveur le droit de juridiction en matière de prises sur tous les navires capturés et amenés dans leurs ports respectifs.1)

Coup-d'oeil rétrospectif sur les droits des neutres.
Voeux de réforme.

§ 175. En jetant un coup-d'oeil rétrospectif sur les droits des neutres, que nous venons de retracer d'après la réalité des choses, nous y apercevons, jusqu'au milieu du présent siècle, beaucoup plus de restrictions et d'entraves que de preuves de respect de la liberté et de l'indépendance des neutres, en même temps

1) [G. Cela ne peut être pris en considération, car d'abord il n'est pas permis d'amener des prises dans les ports neutres, et ensuite, si le fait se présente, le neutre n'a pas de juridiction sur les navires capturés en haute mer; il a seulement le droit et le devoir de leur interdire le séjour dans ses eaux territoriales.]

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