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DE LA

CONTAGION MORALE

FAITS DÉMONTRANT SON EXISTENCE

SON EXPLICATION SCIENTIFIQUE

Du danger que présente pour la moralité et la sécurité publiques
la relation des crimes donnée par les Journaux

PAR

PROSPER DESPINE

Docteur en Médecine

MARSEILLE

ETIENNE CAMOIN, LIBRAIRE
RUE CANNEBIÈRE, 1

1870

65. i. 453

DE LA

CONTAGION

MORALE

FAITS DÉMONTRANT SON EXISTENCE

SON EXPLICATION SCIENTIFIQUE

Du danger que présente pour la moralité et la sécurité publiques la relation des crimes donnée par les Journaux

Des lois régissent le monde moral, de même que des lois régissent le monde physique et le monde organique. Rien, dans la création, n'est livré au hasard ou à la fatalité, deux mots que l'ignorance a inventés, et dont l'emploi diminue graduellement devant les lumières de la science. Aux physiciens et aux chimistes appartient la découverte des lois qui régissent les corps bruts, aux naturalistes et aux physiologistes appartient la decouverte des lois qui régissent le monde organique; aux psychologues appartient la découverte des lois qui régissent le monde moral. Bien que ces dernières lois intéressent l'homme autant, si ce n'est plus, que les premières, nous devons reconnaître que ce sont celles qui ont le moins attiré son attention.

La question de la contagion morale que nous nous proposons de traiter, est une de celles qui méritent, à cause de son importance, la plus sérieuse attention. Comme toutes les questions résolues scientifiquement, c'est-à-dire par l'observation des faits et leur interprétation raisonnée, elle a son côté pratique, et par conséquent utile. L'utilité qui ressortira naturellement de la solution de cette question est non-seulement générale et

universelle, mais, ainsi que nous le verrons plus loin, elle est toute d'actualité et même de localité pour ce qui concerne Marseille.

Le principe de la contagion morale n'est point nouveau; toutes les personnes qui ont étudié les faits moraux ont reconnu l'existence de cette contagion; elles ont même tiré des conclusions pratiques de la connaissance de ce phénomène; mais elles n'ont point signalé la loi sur laquelle il est établi. Aussi, en formulant ici cette loi, croyons-nous remplir une lacune qu'il importait de combler dans la question qui nous occupe.

Nous diviserons ce travail en trois parties. Dans la première, nous démontrerons par les faits l'existence de la contagion morale; dans la seconde, nous donnerons une explication de ce phénomène par la loi qui y préside. Enfin, dans la troisième, nous tirerons quelques conclusions pratiques de cette contagion.

I

Une question se présente tout d'abord: En quoi consiste la contagion morale ? Elle consiste en ceci : que les actes inspirés par les sentiments bons ou mauvais, par les passions, par les bons ou mauvais instincts, donnent aux personnes qui ont connaissance de ces actes, et qui sont susceptibles d'éprouver des sentiments, des passions semblables, le désir de commettre des actes semblables, en excitant en elles ces principes instinctifs. La contagion des bons exemples est un fait trop généralement reconnu pour qu'il soit nécessaire d'insister sur sa démonstration. On a même tiré parti de cette connaissance pour exciter, développer et perfectionner les bons sentiments de l'enfant, pour lui donner une éducation morale. C'est principalement par de bons exemples, par la lecture de faits inspirés par de beaux et de nobles sentiments, que l'on élève sa nature morale, que l'on perfectionne ses bons instincts, autrement appelés: facultés du cœur. Ce qui a lieu pour les bons sentiments a exactement lieu, et par la même raison. pour les mauvais. La connaissance de ce fait est aussi répandue que celle du premier, puisque, tout en cherchant à développer les facultés

morales par les bons exemples on a soin d'éloigner de l'enfant les mauvais exemples, et la lecture des récits immoraux. Voilà donc le principe de la contagion morale implicitement reconnu de tous. Il ne nous reste plus maintenant qu'à mettre cette contagion fortement en relief par quelques faits saillants. Nous les prendrons dans les actes criminels comme étant les plus capables de frapper l'esprit. La contagion des faits moraux et immoraux les plus vulgaires se manifeste à chaque instant aux yeux de l'observateur attentif, mais ils passent généralement inaperçus, vu leur peu d'importance. Il faut donc avoir recours à des exemples capables d'impressionner, pour que cette contagion ne puisse pas être révoquée en doute.

Lorsqu'un crime a un grand retentissement, on est certain d'en voir de semblables se produire peu de temps après. En 1857, une femme assassine son mari à New-york, dans des circonstances qui émeuvent la population. Trois autres femmes assassinent leur mari pendant l'agitation causée par ce procès. - Une tentative d'assassinat sur la reine de Grèce Amélie, par un jeune homme de 17 ans, suivit de près celle qui a été faite par un jeune étudiant sur la personne du roi de Prusse actuel. B... l'auteur de ce dernier attentat. avait puisé lui-même dans la contagion son désir criminel: son idéal était Orsini, l'auteur de l'attentat sur l'Empereur Napoléon III. Le crime du docteur Lapommerais a été suivi de près par le crime exactement semblable du docteur Pritchard, de Glascow.

Le journal le Siècle raconte que la veille du jour où Philippe, l'assassin des filles soumises à la surveillance de la police, a été condamné à mort, alors que tout Paris s'occupait de son procès, un individu se présenta à la tombée de la nuit rue Taranne, chez une de ces filles, et essaya de l'étouffer en lui tamponnant la bouche avec un mouchoir; mais cette personne, résistant avec énergie, put appeler au secours, ce qui mit l'assassin en fuite. Quelques mois après l'exécution de Philippe, c'est-à-dire le 12 septembre 1866, le journal le Droit rapporte le fait suivant qui vient à l'appui de la contagion morale: «La fille Tisserand demeurant, rue de Ponthieu, qui

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