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accepter des jurisconsaltes parce qu'elle serait individualiste, il faut encore qu'elle assure son avantage en expliquant mieux que ne le fait la philosophie du droit ce qu'il subsiste de collectif dans la société. C'est à quoi elle ne manque point.

Prenons la question de la société politique et de l'Etat. La philosophie du droit ne voit en eux qu'un milieu favorable à la garantie des droits de l'individu, elle leur donne le nom de société civile. En science sociale, nous admettons que la société politique et l'Etat existent aussi en partie pour eux-mêmes. Mais quelle est donc la signification de leur existence et comment l'interpréter pour qu'elle ne soit point hostile à l'individu? Cela est extrêmement simple. Si nous nous reportons à cette idée fondamentale que la société comme l'individu a d'abord une existence d'activité et de mouvement, nous observons que le mouvement a lui-même deux formes, celle du mouvement proprement dit et celle du repos ou de l'équilibre, la modalité dynamique et la statique. Eh bien! toute organisation sociale, comme d'ailleurs toute organisation dans la nature, est un moyen par lequel se réalise la forme statique. du mouvement. L'organisation politique existe donc parce qu'il faut qu'il y ait dans la société humaine une certaine fixité, l'Etat se crée parce qu'il faut qu'il y ait de la stabilité. L'Etat est de la stabilité. Cela a l'air d'un jeu de mots dans la langue française, c'est une vérité profonde. C'est pourquoi j'ai dit dans mon Mouvement social que l'Etat puissance publique, l'Etat personnifié que nous connaissons, repose avant tout sur une situation d'état, ou, si l'on veut, que l'Etat, avant d'être une personne est un régime, que ce qu'il y a de fondamental dans l'Etat est le régime de l'Etat et que la fonction essentielle de l'Etat est de donner de la stabilité aux rapports sociaux.

Bien que cette stabilité existe pour elle-même et qu'elle constitue un besoin de la nature entière, il est clair qu'indirectement elle peut être tournée à l'avantage de l'individu; car l'individu aussi qui agit et se meut a besoin de repos et la stabilité du milieu social ne peut que lui être favorable, à la condition qu'elle respecte sa liberté, combinaison d'équilibre mobile qui est à proprement parler l'œuvre de la réaction individualiste et qui aboutit à l'Etat moderne, à l'Etat progressif.

Cette analyse me conduit à préciser la part qui revient au régime d'Etat dans la genèse des droits individuels, Je ne crois pas, ainsi que l'avance M. Boistel, que le régime d'Etat n'influe que sur la modalité des droits et que toute leur substance provienne de la personne individuelle. Elle en vient en partie, mais non en totalité. La question est de savoir si la stabilité qu'il y a dans tout droit, qui distingue par exemple la propriété de la possession, qui fait que les droits se conservent sans être actuellement exercés, si donc cette stabilité qui est en partie due au régime d'Etat, n'est qu'une modalité du droit ou si elle n'est pas plutôt de sa substance. A mon avis elle est de la substance, car un droit est une liberté individuelle dont le pouvoir est assuré de stabilité. Ainsi, le régime d'Etat fournit de leur substance aux droits individuels et ceux-ci naissent en lui. Il ne faut pas confondre le régime d'Etat avec l'Etat personnifié, ni avec le gouvernement, et il ne faudrait pas conclure de ce qui précède que le gouvernement concède les droits. C'est la concession gouvernementale qui ne détermine que la modalité du droit ; quant à sa substance elle s'est créée bien avant dans la situation stable qui est le régime d'Etat. Quant aux relations qui unissent le régime d'Etat avec le gouvernement de l'Etat puissance publique, je n'ai pas le loisir de les étudier ici.

Descendons maintenant jusqu'à la classification des droits fondamentaux de l'individu. M. Boistel, par une analyse dont la justesse m'a frappé, les ramène à deux catégories, celle de la liberté et celle de la propriété (I, p. 96 et s.) ; la liberté est l'activité propre inviolable dans la personne, la propriété est le signe qu'un lien inviolable s'est établi entre la personne et les objets de son activité. Liberté-propriété, forment ainsi un couple parfait qui correspond à cet autre sujet-objet. Toute fois ce couple n'est justifié que du point de vue individuel par la nécessité d'assurer l'inviolabilité de la personne et de toute son activité; la science sociale arrive à une justification plus complète. Il n'y a point de difficulté pour la liberté individuelle, nous savons que la science sociale est obligée de constater l'orientation nettement individualiste du progrès; il y en a peut-être davantage pour la propriété individuelle, car on pourrait être tenté de soutenir que la véritable liberté sera

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PHILOSOPHIE DU DROIT ET SCIENCE SOCIALE

plus pleinement réalisée par la propriété collective que par l'individuelle. Voici la solution de la science. Tout ce qui se meut tend au repos ; dans la vie sociale, l'individu développe de l'activité personnelle, du pouvoir personnel, son activité et son pouvoir tendent à un repos qui soit également personnel. Or la propriété est la stabilité du pouvoir, le repos de l'activité ; la propriété individuelle est donc l'aboutissant logique de la liberté et de l'activité individuelle. Hors la propriété individuelle, la liberté de l'individu est sans signification, car c'est une activité qui cherche sa forme de repos et qui ne la trouve pas. Ainsi la propriété individuelle ne se justifie point parce qu'elle serait le produit de l'activité, c'est-à-dire du travail, cette théorie est erronée ; elle se justifie parce qu'elle est la satisfaction du besoin de repos et de stabilité qui est inhérent à l'activité. Cette explication ne contredit en rien celle de la philosophie du droit, il semble qu'elle y ajoute.

Bien d'autres notions juridiques mériteraient encore d'être examinées, par exemple celle de la lor, mais j'ai la volonté d'être bref. Ces exemples suffisent à montrer que la science sociale a sa place marquée à côté du droit comme une auxiliaire. Je dis auxiliaire. Je me garderai bien de prétendre en effet que la science sociale ait la même valeur que le droit ou la philosophie du droit. Ceux-ci sont des éléments de vie, la science n'est que connaissance pure. Or, à l'encontre de Nietzsche, j'estime que la vie passe avant la connaissance. Seulement, la vie peut utiliser la connaissance. Le droit peut tirer parti de la science sociale, comme il l'a fait par exemple de l'économie politique; la philosophie du droit peut apprendre d'elle qu'il est des bornes que l'individualisme ne saurait dépasser parce que les institutions sociales, même les plus individualistes, ont, vues d'un certain côté, une signification collective.

MAURICE HAURIOU.

Professeur à la Faculté de droit de l'Université de Toulouse.

LA CONSTITUTION FÉDÉRALE AUSTRALIENNE

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Depuis quelques années, la coutume suivante s'est établie en Australie: chaque été, les premiers ministres de toutes les colonies se réunissent en conférence pour régler leur ligne de conduite dans les matières qui sont d'intérêt commun pour l'Australie tout entière. Dans une de ces conférences, tenue en janvier 1895, on résolut de prendre les dispositions nécessaires pour la réunion d'une Convention fédérale australienne. Cette convention devait à son tour se charger d'élaborer une constitution, constitution à soumettre enfin à la ratification d'un plébiscite.

La conférence de cette année s'est occupée, comme on s'y attendait, des amendements proposés à la Constitution. Sa pensée était surtout de rendre ces amendements acceptables pour l'ensemble des colonies.

Les six colonies ont été représentées à la Conférence, et les premiers ministres ont adopté, à l'unanimité, une série d'amendements à soumettre ensuite, en même temps que le bill original de la Confédération, aux électeurs des diverses. colonies.

Comme les échecs des projets antérieurs provenaient de l'opposition de la Nouvelle-Galles du Sud, et que l'adhésion de cette colonie était absolument nécessaire pour tout projet de confédération, on prit la résolution de soumettre immédiatement le nouveau bill à l'approbation des électeurs néogallois.

Voici en substance quels furent les amendements adoptés : La difficulté principale était de fixer une capitale à la confédération, difficulté presque insoluble, étant donné les prétentions rivales et inconciliables de Sydney et de Melbourne. On trancha le différend par une transaction: 1° La capitale

(1) V. les nos de mars-avril et de septembre-octobre, 1899.

devrait être établie sur le territoire de la nouvelle-Galles du Sud: 2o Elle devrait être située à au moins 100 milles de Sydney; 3o A titre provisoire, jusqu'à ce que le parlement fédéral eût définitivement fixé l'emplacement de la capitale et pris les dispositions matérielles pour l'installation des autorités législative, exécutive et judiciaire, ce parlement se tiendrait à Melbourne. On peut citer encore deux résolutions intéressantes concernant la capitale d'abord, à l'instar de Washington, le territoire serait en dehors de tout Etat et sous le gouvernement direct de la Confédération. Ensuite, le territoire de la capitale serait, jusqu'à concurrence de cent milles carrés, la propriété de la Confédération; de cette manière, les plus-values possibles profiteraient, non à des particuliers, mais à la nation.

Sur la question prévue d'un désaccord entre les Chambres, voici la solution des amendements adoptés. Les amendements décident que, dans la réunion des deux chambres en congrès, la décision appartiendra à la majorité absolue, comprenant les trois cinquièmes de l'assemblée entière. La conséquence sera la suivante : Les représentants des deux grandes colonies Nouvelle-Galles du Sud et Victoria, pourront, par leur coalition, faire la loi aux députés des quatre petites colonies.

Voici la solution adoptée relativement aux modifications de la constitution. Si une loi relative à une modification de la Constitution est adoptée deux fois par une des chambres, à la majorité absolue, et que l'autre chambre refuse de s'y associer, il y a appel au corps électoral. Il faut alors, suivant une for mule un peu compliquée, l'assentiment de la majorité des votants dans la majorité des Etats, et aussi la majorité de tous les votants prise en bloc. Il y a peut-être ici un rapprochement lointain à faire avec le pouvoir d'amendement dans la constitution suisse. Du reste, il a été reconnu, et il n'y a pas le moindre doute à cet égard, que le mécanisme pour les amendements d'ordre constitutionnel ne fonctionnant pas de la même manière que celui qui s'applique aux conflits entre les chambres dans les matières simplement législatives, il se peut que le cabinet d'où dépend virtuellement le choix de la marche à suivre préfère parfois abandonner la voie simplement législative et incorporer un projet dans la consti

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