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Russie n'avait retiré ni gloire ni profit des opérations de son armée; que la France n'avait éprouvé que des revers pendant la campagne de 1758; qu'il y avait peu de concert et beaucoup de jalousie entre les généraux autrichiens et les généraux russes, et qu'on ne pouvait pas douter que les Cours de Londres et de Berlin n'eussent encore un parti puissant en leur faveur à la Cour de Pétersbourg. Toutes ces considérations engagèrent le Roi à former un nouveau plan politique, également convenable à sa dignité, à ses intérêts et à sa fidélité à l'égard de ses alliés.

S. M. avait conclu, le 30 décembre 1758 avec l'Impératrice-Reine de Hongrie et de Bohème, un nouveau traité par lequel la France se trouvait dans la nécessité de continuer la guerre en Allemagne aussi long-temps que cette Princesse voudrait mesurer ses forces avec le Roi de Prusse pour reconquérir la Silésie.

Le Roi ne pouvait donc plus, sans rendre sa bonne foi et ses intentions suspectes, exciter la Cour de Vienne à faire son accommodement avec S. M. Prussienne. D'ailleurs l'alliance du Roi avec la maison d'Autriche ne pouvait être utile qu'autant qu'elle serait durable, et il était essentiel de ne pas avoir pour cette maison des procédés qui l'obligeraient à reprendre ses anciennes liaisons avec les ennemis de la France.

La Russie n'ayant ni les mêmes ménagemens à observer ni les mêmes dangers à craindre, pouvait sans inconvénient proposer une médiation armée à laquelle les cours de Vienne et de Berlin seraient forcées de déférer.

Il était naturel de penser que la Cour de Pétersbourg saisirait cette idée avec ardeur, et chercherait à se procurer par la paix une réputation qu'elle ne pouvait guère se flatter alors de se procurer par le succès de ses armes.

D'un autre côté, le Roi désirait sincèrement de faire cesser la guerre avec les Anglais, devenue par les évènemens trop onéreuse aux finances et à la marine de S. M., à la navigation et au commerce de ses sujets.

Le Roi d'Espagne venait de lui offrir sa médiation pour réconcilier la France avec l'Angleterre; et S. M. l'avait acceptée avec autant d'empressement que de confiance dans l'amitié de ce prince.

Il y avait donc apparence que le repos public pouvait être bientôt retabli; d'un côté, par la réconciliation du Roi avec le Roi d'Angleterre, sous la médiation de S. M. C.; et de l'autre, par la paix de l'Impératrice-Reine avec le Roi de Prusse, sous la médiation de l'Impératrice de Russie.

D'après ce système, le Roi fit adresser des instructions au Marquis de L'Hôpital. Dès le

8 juillet de l'année dernière, S. M. lui ordonna de profiter de la première occasion que le ministère russe lui fournirait pour exposer légèrement, et comme de lui-même, le projet qu'on vient d'indiquer.

Soit que le comte de Woronzow, devenu grand Chancelier de Russie, n'eût pas mis le Marquis de l'Hôpital à portée d'exécuter ce qui lui avait été prescrit; soit que l'Ambassadeur du Roi eût jugé qu'il fallait pour cet effet attendre des circonstances plus favorables, il n'aurait fait aucun usage du plan en question, lorsque deux victoires remportées par les Russes sur l'armée prussienne, parurent opérer un changement considérable dans le système et les vues politiques de la Russie.

Jusqu'à cette époque cette puissance, dans tout ce qu'elle avait fait pour le soutien de la cause commune en Allemagne, ne paraissait agir que par un motif d'amitié et de générosité en faveur des Cours de Vienne et de Dresde, et par fidélité aux engagemens particuliers qu'elle avait contractés en 1746 avec l'Impératrice-Reine et le Roi de Pologne, Électeur de Saxe.

Le ministère de Pétersbourg, qui s'était borné à représenter de temps en tenips que les dépenses que la guerre lui occasionnait étaient excessives, n'avait jamais parlé de dédommagement à stipuler pour la Russie, aux dépens du Roi de

Prusse, lorsqu'on négocierait la pacification de l'Allemagne. Cette prétention n'a été produite que sur la fin de l'année derrière, lorsque le Roi et l'Impératrice-Reine ayant invité l'Impératrice de Russie à accéder au traité du 30 de décembre 1758, entre les Cours de France et de Vienne, et au traité du 4 de mai de la même année, entre les couronnes de France et de Danemarck, la Cour de Pétersbourg fit remettre successivement un mémoire le 26 d'octobre et une note le 1" de décembre 1759.

Ces pièces s'expliquent fort clairement sur le dédommagement prétendu de la Russie pour les frais de la guerre. Cette puissance demande formellement la cession, en sa faveur, du royaume de Prusse, du moins jusqu'à ce qu'elle soit remboursée des dépenses qu'elle a faites; et elle fait entendre assez clairement que son intention est de faire dépendre son accession aux deux traités dont on vient de parler, des engagemens qu'elle voulait faire prendre aux Cours de France et de Vienne relativement au dédommagement dont il s'agit.

Le Roi a senti d'abord toutes les conséquences et les dangers d'une pareille prétention, dont l'objet est de convertir une accession simple et des stipulations purement défensives, en un nouveau traité à conclure, dont les suites éloigne

raient nécessairement la pacification, et prolongeraient les malheurs de la guerre au delà des bornes que S. M. désirait de leur donner, et au delà de ce qu'exigeraient d'elle ses alliances actuelles.

Le Roi a une guerre personnelle, et il l'a constamment soutenue par ses propres forces, sans avoir stipulé dans aucun de ses traités nulle espèce de secours ni en troupes, ni en vaisseaux, ni en argent, de la part de ses alliés. S. M. n'a même demandé aucun avantage pour elle, par rapport à la guerre d'Allemagne; et quoique cette guerre ait été et soit encore beaucoup plus onéreuse à ses finances qu'à celles de la Russie, le Roi continue de secourir, avec la plus grande vigueur, ses alliés dans l'Empire, sans autre fruit que la gloire de remplir, avec la fidélité la plus scrupuleuse et la plus grande générosité, les engagemens qu'elle a contractés soit avec le Corps germanique par les traités de Westphalie, soit avec la Cour de Vienne par le traité défensif du 1o de mai 1756. Enfin S. M. n'a aucun intérêt secret à continuer la guerre; elle désire très sincèrement la paix; et comme ses vues sont remplies d'équité et de modération, sa façon de procéder est conforme à ses sentimens.

Rien n'est plus contraire à de pareilles dispositions que la prétention de la Russie, à qui les succès ont fait concevoir des projets de cupidité

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