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par rapport à une fixation de limites entre l'Empire russe et la Pologne; enfin le système et la conduite de la Russie, la forme de son administration et son état militaire, doivent faire craindre l'agrandissement de cette puissance à tous les Princes qui ont à cœur la sûreté et le repos public. Ce motif suffirait pour faire désirer au Roi que l'Impératrice de Russie se désistât de ses prétentions sur la Prusse ducale; quand même S. M. n'aurait pas une raison plus pressante et plus prochaine de détourner un projet qui ne pourrait que multiplier les calamités de la guerre et les embarras de la paix.

Le Baron de Breteuil sentira aisément qu'il ne doit faire usage de ces détails que pour veiller avec attention sur les desseins de la Russie relativement à tous ces objets, et sur les mesures qu'elle pourrait prendre ou préparer pour en assurer tôt ou tard l'exécution.

Cette vigilance est d'autant plus nécessaire, que la cour de Pétersbourg a un plan de politique bien formé dont elle ne s'écarte pas, et qui paraît bien lié dans toutes ses parties; mais qu'elle ne développe que successivement, et à mesure que les événemens et les circonstances lui en fournissent l'occasion. D'ailleurs ses ministres défians et soupçonneux joignent à la dissimulation naturelle à leur nation, la suite la plus mé

thodique dans leurs propos, dans leurs écrits et dans leurs démarches.

On a déjà dit qu'ils ont souvent témoigné au Marquis de L'Hôpital le désir qu'a l'Impératrice de Russie de négocier directement avec le Roi et indépendemment de la Cour de Vienne, Ils tiennent vraisemblablement le même langage à celleci; et leur intention est sans doute de ménager la France et l'Autriche, et de les contenir l'une par l'autre pour les faire servir également au succès des vues d'ambition qu'on peut leur supposer, du moins quant à l'influence à se procurer dans les affaires générales de l'Europe.

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Il n'est rien moins qu'impossible que la Cour de Vienne se conduise suivant les mêmes principes, vis-à-vis de la France et de la Russie.

Le soin d'éclairer ce jeu politique doit être un des principaux objets de l'application du Baron de Breteuil; et il doit rendre le compte le plus circonstancié et le plus fidèle de tout ce qu'il pourra démêler sur une matière si intéressante. Le Roi veut maintenir son alliance avec ces deux puissances, mais sans déroger à la dignité qui convient à sa couronne.

Il serait superflu de faire ici le portrait des principaux personnages de la Cour de Péterbourg. Le Baron de Breteuil qui a vu ce qui se trouve à ce sujet dans les relations du Marquis de L'Hô

pital, examinera par lui-même si les notions qu'elles renferment des talens, du caractère et des intentions des princes, ministres ou courtisans russes, sont fondées sur des connaissances assez approfondies et assez impartiales, et il étudieraà loisir, avec le discernement dont il est trèscapable, les bonnes et les mauvaises qualités, la capacité, le génie, les inclinations et le crédit des personnes avec lesquelles il doit vivre et négocier.

Le Roi lui ordonne plus particulièrement encore de s'appliquer à connaître, avec autant de précision qu'il sera possible, quelles sont les affections et les vues du Grand-Duc et de la Grande-Duchesse, et de travailler, mais sans marquer ni affectation ni trop d'empressement, à se concilier leur bonté et leur confiance. Le marquis de L'Hôpital, par des motifs que la droiture de ses intentions justifie, n'a point cultivé cette jeune Cour; et il a surtout indisposé contre lui la Grande-Duchessse, à l'occasion de la part qu'il a eue au rappel du comte Poniatowski, pour qui cette Princesse paraissait avoir un goût décidé et une inclination très-vive. Le Baron de Breteuil,

à

qui sans doute elle ne manquera pas de faire porter indirectement quelques plaintes à cet égard, profitera de cette occasion et de celles qui se présenteront par rapport au même objet, pour insinuer avec dextérité, qu'il connaît assez le senti

ment du Roi pour le Grand-Duc et la GrandeDuchesse, pour assurer que S. M. serait aise de contribuer à leur satisfaction, et que s'il leur était agréable de revoir à Pétersbourg le comte Poniatowski, non-seulement S. M. n'y formerait aucune opposition, mais serait même disposée à concourir au succès des mesures qu'on croirait devoir prendre pour engager le Roi de Pologne à le charger de nouveau de ses affaires en Russie.

Le Baron de Breteuil a trop d'usage du monde pour ne pas s'expliquer sur cette matière avec la plus grande circonspection, de façon à ménager scrupuleusement la délicatesse de l'amour-propre de la Grande-Duchesse, etc.

Sur la position de la France et de la Russie.

Ce qui constitue une alliance, ce sont les traités et les engagemens mutuels; ce qui la rend solide et durable, c'est le rapport des intérêts et la réciprocité des avantages. Dans ce sens, l'on peut dire que la France n'a point d'alliance avec la Russie. Ces deux puissances sont l'une à l'égard de l'autre comme deux personnes indifférentes entre elles, qui ont un ami commun, et qui agissent de concert pour l'intérêt de cet ami, mais qui n'ont aucune liaison directe sur tout ce qui lui est étranger. Telle est jusqu'à présent la situa

tion politique de la France vis-à-vis de la Russie. La Cour de Vienne est le point de réunion de ces deux puissances, et l'unique lien de leur amitié. On peut faire à ce sujet deux réflexions : la première, que la cour de Vienne a un intérêt essentiel à maintenir cette position, et à conserver deux puissans alliés toujours prêts à s'armer en sa faveur, sans se concerter entre eux pour leurs avantages réciproques. Aussi voyons-nous qu'elle met toute son attention à rendre ses traités communs entre la France et la Russie, et toute son adresse à n'y stipuler que son agrandissement personnel.

La seconde, c'est que la Russie a presque toujours été l'ennemie de nos amis et l'amie de nos ennemis. Cette bizarrerie apparente est cependant très-naturelle, et provient nécessairement de la révolution subite qui s'est faite dans notre système politique, où nous avons voulu allier les contraires, et de ce que nous n'avons avec elle qu'une union indirecte et précaire : de là naissent les obscurités et les embarras de nos négociations à Pétersbourg, et l'espèce de défiance qui règne entre deux cours nouvellement unies dont l'amitié n'a aucun point d'appui, et qui sont respectivement dans une situation équivoque.

D'après cette exposition, il paraît qu'il n'y a que deux moyens de se faire un système fixe et

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