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II.

LE DROIT PUBLIC EUROPÉEN.

Origines. 1)

§ 6. Le droit international européen d'aujourd'hui est dû au christianisme et à la civilisation. On rencontre déjà, il est vrai, chez les peuples de l'antiquité dans leurs rapports internationaux des usages uniformes, surtout en ce qui concerne leurs modes de faire la guerre, de recevoir les ambassades, de conclure des traités entre eux et d'admettre le droit d'asile. L'observation de ces usages néanmoins ne reposait nullement sur la base d'une obligation formelle envers les autres peuples, mais plutôt sur des idées religieuses de chaque peuple et sur les mœurs qu'elles avaient établies. Les ambassadeurs et les fuyards qui venaient implorer la protection d'un peuple étranger étaient réputés inviolables, parce qu'on les considérait comme étant placés sous la sauvegarde de la religion dont ils revêtaient les symboles sacrés. Pareillement des solennités, des serments et des sacrifices plaçaient les traités politiques sous la protection divine. Mais en dehors de ces idées religieuses on ne se croyait nullement tenu envers les étrangers.,,La guerre éternelle aux barbares," fut le mot d'ordre, le,,schiboleth" de la nation la plus civilisée du monde antique, les Grecs, dont les philosophes aussi ne reconnaissaient d'autres rapports juridiques avec les nations étrangères que ceux fondés sur des traités. 2) Des liens plus étroits existaient sans

1) On les trouve développées dans l'ouvrage de R. Ward, Inquiry into the foundation and history of the law of nations in Europe from the time of the Greeks and Romans to the age of H. Grotius. London 1795. 2 vols. Ajoutons H. Wheaton, Histoire des progrès du droit des gens depuis la Paix de Westphalie. Leipz. 1841. 2e édit. 1846. 3e édit. 1865, et le commentaire de M. Will. Beach Lawrence, publié à Leipz. depuis 1868. Müller-Jochmus, Geschichte des Völkerrechts im Alterthum. Leipzig 1848. De Wal, Inleiding tot v. W. d. h. Volkenregt. Groning. 1835, p. 124-171. T. Laurent, professeur à Gand, Histoire du droit des gens, Paris 1851, intitulée dans les éditions d'à présent Études sur l'histoire de l'humanité, 18 v.

),,Cum alienigenis, cum barbaris aeternum omnibus Graecis bellum est."

doute, même des rapports juridiques permanents entre les tribus de même race, mais ils tiraient leur force surtout de la communauté du Culte religieux et des institutions politiques auxquelles elle servait de base. 3)

Les Romains ne professaient guère des idées plus libérales. 4) Ils avaient un droit fécial, mais uniquement pour les usages de la guerre et pour les solennités des traités, ) leur politique

Liv. XXXI, 29. V. aussi ce que dit le philosophe Épicure dans Diogène Laert. Apophthegm. XXXI, 34-36. V. également Platon et Aristote. [G. Ce dernier conseillait à Alexandre le Grand de se mettre à la tête des Grecs, mais de réduire les barbares en esclavage.]

3) Ce qu'on designait sous le nom de κοινὸς νόμος Ἑλλήνων. Thucydide III, 58. V. St. Croix, Gouvernements fédératifs p. 51. C'est là notamment qu'il faut mettre l'institution moitié religieuse, moitié politique de la Ligue amphictyonique. [G. Mais lorsque la situation politique changea, que quelques États acquirent une haute importance et que d'autres allèrent en déclinant et perdirent même leur indépendance, l'amphictyonie se borna essentiellement aux affaires religieuses se rapportant à l'oracle de Delphes. Pendant les grandes guerres de la Grèce on n'entend point parler de cette ligue; quelquesuns des États de cette fédération prirent même parti pour la Perse. L'amphictyonie n'osa jamais faire opposition aux grands États tels que Sparte et Athènes, elle ne fit non plus aucune tentative pour empêcher la guerre du Péloponnèse et ne se déclara contre Sparte qu'après la victoire d'Epaminondas. Les États grecs ne surent ni donner une forme internationale à leur communauté de race et d'origine ni maintenir par un commun accord leur propre liberté. Les traités furent conclus entre les classes dominantes des différents États. On trouvera des renseignements détaillés sur les rapports internationaux des États grecs dans l'ouvrage de Schömann, Griechische Alterthümer, t. 2, 1873, 3e ed.]

4) Nous rappelons cette maxime de la Loi des XII Tables: ,,adversus hostem aeterna auctoritas esto", maxime qui se retrouve encore dans les collections Justiniennes, où elle est formulée ainsi: que tous les peuples avec lesquels des pactes n'ont pas été conclus, sont réputés „hostes.“ L. 5. § 2. L. 24 Dig. de capt. L. 118 D. de Verb. Sign. V. Osenbrüggen, de jure belli et pacis Romanor. Lips. 1835. H. E. Young, De jure postliminii, Berol. 1854, § 4. Comparez de plus W. Wachsmuth, jus gentium quale obtinuit apud Graecos. Berol. 1822. et A. W. Heffter, prol. acad. de antiquo jure gentium. Bonn. 1823.

) [G. Au collegium feciale incombait l'instruction du procès international. Le principe fondamental était qu'aucune guerre n'était juste si elle n'avait été précédée d'une demande formelle en réparation et, en cas de refus, d'une déclaration de guerre formelle. On reconnaît dans ce principe la conscience que la guerre ne doit intervenir que quand les moyens pacifiques ont eté épuisés; mais au fond ce n'était qu'une formalité, qui n'empêchait pas qu'une guerre fût souverainement injuste, ce qui fait dire à Lactance que les féciaux n'étaient que l'instrument ,,legitime injurias faciendi." La politique romaine est

était, il est vrai, plus noble par sa tendance cosmocratique que celles d'autres peuples de l'ancien monde; on accordait aisément l'amitié du peuple romain à ceux qui y aspiraient, ainsi que le droit des gens privé aux étrangers dans leur commerce mutuel et avec les Romains; mais on ne souffrait point de rivaux: on les écrasait. En général Rome à la hauteur de son pouvoir comme maîtresse du monde ne consulta que ses propres lois et le droit des gens y reconnu, dont la pratique fut revêtue de formes fastueuses par l'Empire byzantin.

La coutume internationale des peuples de l'Occident et du Nord se présente d'abord sous des formes très - rudes.") La liberté individuelle était la loi des peuples germaniques et avec elle le port d'armes, le droit de guerre, le pillage, la piraterie, tant qu'ils ne furent pas soumis à des gouvernements royaux et en même temps aristocratiques, qui se trouvaient en état de resteindre cette liberté. Du reste l'étranger était réputé être hors de la loi à moins qu'il ne fût protégé par l'hospitalité.

Au christianisme était réservée la haute mission de diriger ces peuples dans une nouvelle voie. Son amour de l'humanité, son précepte: „Fais tu bien aussi à ton ennemi" ne pouvaient guère s'accommoder avec un était d'hostilité permanente.")

Dorénavant l'église, installée successivement dans tous les états de l'Europe, se chargea de l'œuvre civilisatrice, c'est-à-dire d'adoucir et de corriger les mœurs farouches des peuples comme de leurs maîtres en usant de son autorité spirituelle. Les papes et les conciles supprimèrent de nombreux usages barbares dans le commerce mutuel des peuples; ) ils leur offraient de plus une

fondée sur la guerre et sur les alliances, le trait d'union international du foedus" devient administratif dans la ,,societas" et la société engendre l'imperium.] 6) K. Th. Pütter en trace un tableau de grand mérite dans ses Beitr. zur Völkerrechts-Gesch. u. Wissenschaft. Leipz. 1843, p. 48 et s.

[G. Quoique le christianisme se tienne, par principe, éloigné de la politique, il a cependant exercé sur elle la plus grande influence en affranchissant l'État des liens du culte national et en mettant fin à l'antithèse antique qui divis ait l'humanité en races dominantes et en races esclaves. Il a créé dans l'unité du genre humain et dans l'égalité des droits respectifs de ses membres le principe éventuel d'un droit international réel.]

5) Cf. Walter, Kirchenr. § 342. 1871, 14e éd.; puis Pütter, 1. c. [G. C. un. I de sagittar. (5. 15). Bien que les décisions des conciles n'aient pu faire prévaloir la Treuga Dei, ni amener la suppression de la piraterie. Si malgré cela Walter fait ressortir les efforts des papes pour le maintien de la paix,

médiation dans les différends nés entre eux. En même temps les croisades sanctionnées par l'église ainsi que les lois de la féodalité et de la chevalerie contribuaient au rapprochement social des nations chrétiennes de l'Occident, 9) à l'exception de

on peut également citer des preuves du contraire, p. ex. la croisade contre les Albigeois et la ligue de Cambrai; si, d'après lui, la papauté n'a reconnu le droit de conquête qu'en vue de la conversion des peuples vaincus, il faut néanmoins faire observer que cette conversion ne procédait pas toujours, comme il l'affirme, avec ménagement, mais recourait souvent aux moyens violents, p. ex. en Prusse, en Livonie, au Mexique et au Pérou. En outre ce prétexte ne se trouve nullement confirmé par un événement des plus remarquables, l'autorisation papale accordée à Henri II de conquérir l'Irlande (1155). Voici, en effet, ce que le pape Adrien IV écrit: „Sane Hiberniam et omnes insulas quibus sol justitiae Jesu Christi illuxit et quae documenta fidei Christianae susceperunt, ad jus Beati Petri et sacrosanctae ecclesiae non dubium est pertinere." Il s'arroge donc une suprématie, en vertu de laquelle il dispose de l'Irlande et réclame en conséquence un impôt annuel d'un denier par maison. (Bullar. Rom. 1739. II, p. 351.) Les papes qui allèrent le plus loin dans cette voie sont Innocent III et Boniface VIII. Le premier écrit au patriarche de Jérusalem (Epp. Lip. II, ep. 209): Jacobus enim, frater Domini, Petro non solum universam ecclesiam sed totum reliquit saeculum gubernandum. Boniface déclare dans la bulle „Unam sanctam ecclesiam" que le roi porte le glaive séculier „ad nutum et patientiam sacerdotis." Tout le monde connait également la prétention des papes de déclarer nuls et non avenus les serments et les traités qu'ils regardaient comme préjudiciables à l'Église. C'est ainsi que le pape Innocent III, en déclarant nulle la Magna Charta, s'appuyait sur les paroles du prophète: Constitui te super gentes et regna, dissolve colligationes impietatis (Rymer, Foedera, I, p. 135); Alexandre IV écrivait de même à Henri III: cum juramenti religio fieri non debeat pravitatis et perfidiae firmamentum (ibid. p. 406.).]

9) [G. Il est vrai que le moyen âge a été une époque tout aussi belliqueuse que l'antiquité, mais le régime féodal rendait les longues guerres impossibles. La guerre, en revanche, ne se faisait pas seulement de pays à pays, mais de château à château; le manque de sécurité était général. Le moyen âge témoigne néanmoins de progrès incontestables. Tandis que l'antiquité ne connaissait que des États dominants et des États dominés, nous voyons désormais tous les peuples chrétiens traités comme égaux. Le sentiment de la hiérarchie sociale respectait la condition d'autrui, on pouvait tuer un prince fait prisonnier, mais il n'était pas admis qu'on pût en faire un esclave. Le droit d'hospitalité était devenu un devoir (1. Burg. 38, 1), la captivité était plus humaine, le serment de chevalerie défendait que plusieurs prirent les armes contre un seul et enjoignait de tenir parole et d'observer la foi jurée envers tout le monde. Le droit féodal du moyen âge confondait le droit public et le droit international, sans qu'il soit possible de trouver une limite entre les deux. Le fief et le droit de succession priment tout, les traités comme celui de Verdun, ne sont que des pactes de famille.]

l'Empire grec, lequel se tenait ou était tenu par les circonstances, surtout par son affaiblissement politique, dans un certain éloignement des états occidentaux. Représentés par leurs princes, ceux-ci formèrent en quelque sorte une grande famille chrétienne autour de l'église romaine, dont les canons faisaient loi dans les pays chrétiens. A côté du droit canon se plaça encore 10) l'autorité du droit romain comme d'un droit commun à tous les chrétiens. Chacun de ces deux corps de lois reconnaît un droit naturel et des gens.11)

Cependant aucun état, peuple ou prince, ne s'est soumis entièrement et sans réserve, ni au droit romain ni au régime absolu de la hiérarchie en matière politique; au contraire on a réclamé et exercé même une concurrence politique dans les affaires ecclésiastiques. Enfin les gouvernements laïques ont fait valoir comme principe supérieur leur souveraineté et indépendance. Voilà une nouvelle phase du droit international, dont les traces se trouvent empreintes aux actes et procédés du concile de Constance (1414-1418) et de celui de Bâle (1432-1448). 12)

10) Les jurisconsultes du moyen âge, et encore André Alciat (sur les lois 118 et 225 D. de Verb. signif.) en donnaient l'explication suivante: L'empereur Antonin Caracalla ayant déclaré citoyens romains tous les habitants de l'empire, il s'ensuit que tous les chrétiens comme seuls capables de tous les droits politiques, représentent le peuple romain, tandis que les infidèles ne sont pas réputés Romains. Les Romains seuls admettent entre eux des droits et des devoirs communs: ils sont engagés dans une guerre permanente contre les Turcs et les Sarrasins, état de guerre régi par les règles du droit romain. Comparez Leibnitz, praef. ad Cod. iur. gent. [G. De là l'importances des légistes, des chevaliers ès-lois, plus royalistes que le roi; le fond de leur jurisprudence est le principe: Si veut le roi, si veut la loi.)

11) Voyez le Décret de Gratien Dist. 1, can. 9.

12) Comparez le Droit des gens par Klüber, § 12. Oppenheim, System des Völkerr. p. 20. [G. Le principe de la souveraineté a été formulé pour la première fois par Bodin. D'après le droit féodal, le seigneur ne devenait maître que par l'acte d'aveu du vassal; maintenant, l'autonomie est subordonnée à la souveraineté du prince. C'était la réaction contre le morcellement de l'État par le système féodal; mais l'Angleterre exceptée, elle aboutit à l'absolutisme et à la politique de cabinet, dans laquelle le droit disparait. C'est dans les États Italiens et en France que ce développement s'accentue le plus. Macchiavel érigea en système la politique dégagée de tout élément moral, et, à la cour de France, on disait déjà sous Louis XI qu'il fallait profiter des circonstances pour s'emparer de tous les pays situés en deçà du Rhin (Martin hist. de Fr. VI p. 413). Cette école qui aboutit aux Chambres de réunion Heffter, droit international. 4o éd.

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