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Mesures de correction et de rétorsion.

§ 112. D'un autre côté le droit public Européen permet encore de recourir à des mesures purement correctives lorsqu'un gouvernement, sans porter atteinte aux principes du droit des gens et aux traités existants, adopte pourtant envers un autre ou tous les autres ou envers leurs sujets des maximes contraires à l'équité (§ 27). L'inégalité dans le traitement de sujets étrangers consistera tantôt dans leur exclusion absolue de certains avantages accordés aux nationaux, tantôt dans des faveurs accordées à ceuxci au détriment des premiers. Quelquefois elle résultera également, même par rapport aux nationaux, de l'application de certains principes contraires à ceux reçus chez les autres nations et de nature à produire pour celles-ci des conséquences matérielles fâcheuses. Dans ces différents cas ce n'est pas à des représailles, mais à la voie de rétorsion qu'on aura recours; c'est-à-dire, dans un esprit d'égalité et afin d'obtenir le redressement de ces iniquités, on emploie envers la puissance qui en commet, des mesures analogues, jusqu'à ce qu'elle consente à y renoncer. 1) Ce qui distingue la rétorsion (retorsio juris) des représailles, c'est que celle-là a pour but de faire cesser des actes d'iniquité (jus iniquum), tandis que celles-ci ont pour objet de réagir contre l'injustice. Elle s'appuie sur cette maxime: ,,quod quisque in alterum statuerit ut ipse eodem jure utatur." C'est par là qu'elle fait ressentir à la partie adverse le caractère égoïste et exclusif de ses procédés. 2)

La rétorsion peut avoir lieu non-seulement dans les cas où un gouvernement a déjà fait l'application d'un principe préjudiciable à un autre dans certaines espèces, mais aussi dès le moment où il l'a sanctionné. Néanmoins une simple divergence de dispositions dans les lois de deux pays, lorsqu'elles ont seulement l'effet casuel d'exclure les sujets étrangers de certains avan

1) [G. La rétorsion, étant un moyen moins tranchant que les représailles, aurait dû être traitée la première. La rétorsion est destinée à faire sentir à la partie opposée l'iniquité de sa manière d'agir, les représailles tendent à lui infliger un mal spécial ou à se procurer une indemnité. La rétorsion est déjà justifiée quand un État traite les sujets d'un autre moins bien que ceux d'un tiers gouvernement.]

2) J. Gothofr. Bauer, Opusc. t. I, p. 157 seq.

tages dont ils jouiraient dans leur propre pays, ne suffira jamais pour justifier des mesures de rétorsion, pourvu que ces dispositions ne soient pas dirigées d'une manière expresse contre les sujets étrangers. Ainsi il est évident que les dispositions d'un code qui établissent des modes ou des ordres de successions particuliers, différents de ceux sanctionnés dans d'autres codes, ne suffiront pas pour motiver des mesures semblables.

D'ailleurs la rétorsion est une mesure essentiellement politique, dont les magistrats et les particuliers ne peuvent faire usage qu'en vertu d'une autorisation de leur gouvernement, rendue dans les formes légales, qui détermine en même temps le mode et les conditions de la rétorsion, ainsi que les personnes qui sont appelées à en profiter. 3) Les règles particulières à cette matière sont du domaine du droit public interne.

Si les circonstances ne permettent pas d'appliquer à un gouvernement étranger des mesures identiques sur les mêmes objets, la rétorsion s'effectuera par voie d'analogie et selon les circonstances données. Ainsi, par exemple, si le commerce d'un certain pays venait à être frappé dans un autre de droits exorbitants ou qu'il y éprouvât des difficultés sérieuses, le gouvernement lésé y répondrait en imposant les produits similiaires de droits analogues.

Chapitre II.

LE DROIT DE GUERRE.')

Définition de la guerre.

§ 113. La guerre se manifeste extérieurement comme un état d'hostilités existant entre plusieurs puissances, pendant lequel elles se croient autorisées à faire réciproquement usage entre

3) Struben, Rechtl. Bedenken V, 47. Spangenb. II, p. 321.

1) [G. Le mot "guerre" est dérivé de l'allemand du moyen âge „werra“, défense.] Les monographies relatives à cette matière, notamment celles publiées par Alberic Gentile, J. Gottl. Fréd. Koch et Joach. E. de Beust, sont

elles de violences de toute espèce. C'est la définition matérielle de la guerre. Mais considérée au point de vue légal, la guerre ne sera un droit qu'autant qu'elle présente un état régulier de violences et de destruction, lequel se propose un but légitime, et

indiquées par d'Ompteda § 290. 291. de Kamptz § 271. 272. de Clausewitz, dans son ouvrage intitulé: Vom Kriege. Berlin 1832. t. I, p. 105, retrace une histoire générale de la guerre. Comparez aussi N. Villiaumé, L'esprit de la guerre. Principes nouveaux du droit des gens, de la science militaire et des guerres civiles 3. éd. 1864. L'Histoire du droit de guerre et de paix de 1789-1815 par Marc Dufraisse. Paris 1867. P. J. Proudhon, La guerre et la paix. I vol. 1869. Morin, Les lois relatives à la guerre. Paris 1872. v. Revue de dr. intern. IV, p. 481 et 550 ibid. H. Brocher, Les principes naturels du droit de la guerre Essai de la philosophie de la guerre. 1872. Hely, Étude sur le droit de la guerre de Grotius. 1875. E. Nys, Le droit de la guerre et les précurseurs de Grotius. 1882. H. Brocher, Les révolutions du droit. vol II. 1882. Du point de vue politique. P. Leroy-Beaulieu, Recherches sur les guerres contemporaines 1853-66. 1869. Larroque, De la guerre et des armées permanentes. 1866. Une codification du droit de guerre moderne par Bluntschli (Nördlingen 1866) est insérée dans son droit des gens. [G. Cette codification a été vivement et judicieusement critiquée par le gé néral de Hartmann (Militärische Nothwendigkeit und Humanität 1871); mais en regardant erronément les théories de Bluntschli comme étant des règles internationales reconnues, le général, de son côté, passe la mesure et nie le droit de guerre. Le maréchal de Moltke dans sa lettre célèbre à Mr Bluntschli du 11 déc. 1880 parait être du même avis. D'après lui, le moyen le plus sûr de diminuer les horreurs de la guerre, consiste, pour les masses, dans l'éducation et, pour les chefs, dans une loi à la qu'elle ils se conforment autant que le permettent les circonstances de la guerre; enfin dans l'exclusion dans la lutte des moyens condamnables. Quelle sera cette éducation en vue de la guerre, quelle doit être cette loi imposée aux chefs et enfin quels sont les moyens condamnables auxquels il est interdit de recourir? le maréchal ne le dit pas. Mais les raisons que l'on allègue contre l'éxistence d'un droit de guerre sont plus spécieuses que solides. On a dit: la guerre est par elle même la substitution de la force à la justice, elle ne saurait donc avoir d'autres lois que celle du plus fort, qui armis plus posset" comme disaient les Romains, et il vaut même mieux qu'elle ne soit pas mitigée par des lois restrictives, car plus elle sera terrible, plus elle sera courte et rare, les peuples redoutant les maux de la guerre. Sans doute, la guerre est un appel à la force, mais non à la force libre de toute entrave. Si on repousse en principe tout frein. il sera difficile de prouver qu'il y a des moyens condamnables, on fera flêche de tout bois. Mais comme le droit de faire la guerre dérive de la nécessité de la propre conservation des États, le droit de guerre, c'est à dire, le droit observé dans la guerre établit que l'emploi de la force est limité par le principe même qui le justifie, celui de la nécessité, la guerre ne donne aucun droit qui ne soit nécessaire à sa fin. Si de notre temps les guerres sont devenues plus rares et plus courtes ce n'est certes pas qu'elles soient sans merci; la raison est que

continue à l'être jusqu'au moment où ce but sera atteint. 2) La guerre, en d'autres termes, est l'emploi extrême de violences légitimes. Tantôt d'un caractère purement défensif, elle cherchera à repousser une agression injuste, et à cet effet elle préviendra même des menaces suspendues au-dessus d'elle. ) Tantôt réellement offensive, elle exigera le redressement des offenses ou des injures éprouvées par une juste et pleine satisfaction. C'est ce qui constituera la justice de sa cause. Le grand Frédéric déjà écrivit en ce sens dans son Anti-Macchiavel (chapitre 26) ces paroles remarquables: „Toutes les guerres qui n'auront par but que de repousser des usurpateurs, de maintenir des droits légitimes,

les grandes armées fondées sur le service obligatoire, sur les armes modernes et sur les chemins de fer qui permettent une locomotion rapide, amènent une prompte solution. Enfin il n'est pas même exact de dire que la guerre mette fin aux traités qui existaient entre deux États; il y en a qui subsistent, il y en a même qui n'entrent en vigueur qu'avec la guerre. (§ 141.) On peut donc maintenir le mot de Grotius: „Belli ac pacis sunt sua jura." La guerre moderne est limitée 1) parcequ'elle est essentiellement passagère; on ne la fait que pour arriver à la paix; 2) parcequ'elle est exclusivement dirigée contre un ou plusieurs adversaires déterminés, elle distingue entre belligérants et neutres; 3) parcequ'elle reconnaît à l'adversaire les mêmes droits que ceux que l'on revendique pour soi-même; en respectant le droit du guerre ou sacrifie peut-être un avantage passager et partiel, pour sauver un intérêt durable et général. La lutte a donc certaines conditions, qui tendent à resteindre autant que possible la destruction de la confiance, qu'engendraient les procédés interdits. v. Actes de la conférence de Bruxelles 1874. Laveleye, Les actes de la conférence de Bruxelles 1875. Lüder, Der neueste Codificationsversuch auf dem Gebiete des Völkerrechts. 1874.]

) [G. La proposition de Bluntschli (511): „Dans la règle la guerre est une contestation juridique entre les États en tant que parties belligérantes au sujet du droit public" confond, comme Hartmann le fait ressortir, la cause et l'essence de la guerre. Une contestation juridique peut devenir la cause de la guerre; la guerre elle-même n'apparaît point, comme Bluntschli le dit (510) seulement sous forme de lutte physique; elle est la lutte physique même et rien que cela. Cette lutte consiste dans les efforts que font deux États pour triompher par la force du conflit des intérêts et des prétentions, conflit qui ne semblait pouvoir être écarté au moyen d'une entente ou par des actes de défense personnelle unilatérale; chacun des adversaires s'efforce, par le déploiement de toutes ses forces, à détruire les moyens par lesquels l'autre adversaire soutient sa volonté. Le général de Clausewitz définit la guerre un acte de violence destinée à forcer l'adversaire à se soumettre à notre volonté, un conflit des intérêts politiques ou sociaux vidé par la force.]

*) S. ci-dessus § 30 et Guil. Schooten, De jure hostem imminentem praeveniendi. Specim. jurid. Lugd. Bat.

de garantir la liberté de l'univers et d'éviter les violences et les oppressions des ambitieux, sont conformes à la justice."

Quoiqu'il en soit il deviendra souvent très-difficile de se rendre compte de la justice d'une guerre. Les auteurs sont d'accord là-dessus. Ceux-là même en conviennent qui ont cherché minutieusement de faire une analyse des différentes causes d'une juste guerre, et ont inventé une espèce de responsabilité juridique à l'égard de celui qui prend les armes sans sujet légitime. 1) Il n'existe en effet sur terre aucun juge qui puisse d'une manière infaillible, prononcer sur la justice d'une guerre. Ajoutons que celle-ci est dirigée par le hasard, sans qu'il soit possible de prévoir d'avance ses nombreuses péripéties. En faisant succéder à l'ordre le chaos, elle fait sortir pourtant de ce dernier un ordre de choses nouveau, quelle qu'ait été la cause de la guerre. Seulement les résultats moraux d'une guerre injuste ne seront pas ceux d'une guerre légitime. Jamais aussi des intérêts purement politiques, des intentions moralement bonnes mêmes, dès qu'elles ne sont motivées par aucune lésion imminente ou déjà accomplie, ne suffiront pour purifier une guerre de son caractère illégitime. Mais nous regardons comme oiseuses toutes les discussions abstraites sur la légitimité des guerres de religion, de vengeance, d'équilibre politique. Cette question puise ses éléments de solution dans les circonstances particulières à chaque espèce et dans les principes internationaux que nous avons retracés dans le livre précédent.

4) Parmi ces auteurs figurent Grotius et Vattel III, § 183 suiv. 190. Déjà Cocceji, dans son commentaire sur Grotius III, 10, 3 suiv. a montré jusqu'à quel point la distinction entre le droit naturel et le droit positif est insuffisante sur ce point. [G. Si la guerre n'est justifiée que par la nécessité, il est évident qu'elle n'est juste que si elle est défensive. Seulement il ne faut pas prendre la défense dans un sens trop étroit. On l'a dit avec raison: Le véritable agresseur n'est pas celui qui attaque le premier, mais celui qui rend la guerre inévitable. Frédéric le Grand ayant en main les preuves de la coalition qui voulait l'écraser, était en droit de devancer les projets de ses ennemis en envahissant la Saxe. Une guerre peut même être légitime quand elle attaque un droit formel mais suranné. L'Autriche et les anciens États Italiens souverains avaient le droit de conclure des alliances, mais la prépondérance autrichienne empêcha tout développement de la vie nationale dans la péninsule et la nécessité de briser ce ban était la justification de la guerre de 1859, bien qu'on doive désapprouver la manière dont elle fut amenée par Napoléon III et Cavour. De même une guerre même agressive peut être juste quand elle est entreprise par un État pour venir au secours d'un autre État injustement attaqué.]

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