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usages, dont aussi les théoriciens de l'école historique surtout se sont constitués les ardents défenseurs.

En effet, en ce qui concerne d'abord le domaine des biens appartenant au gouvernement vaincu, la pratique du siècle dernier a souvent confondu la simple invasion avec la conquête définitive (ultima victoria), et elle a fait découler de la première des conséquences qu'il faut attribuer à la seconde seulement. D'après un usage presque constant, le souverain victorieux, après s'être emparé de l'intégrité ou d'une partie du territoire ennemi, se faisait rendre par ses habitants l'hommage de sujétion. De nombreux auteurs continuaient à professer l'ancienne théorie, suivant laquelle les biens appartenant à l'ennemi étaient réputés sans maître (res nullius), et ils en concluaient que la conquête pourrait avoir pour effet une confiscation au préjudice du gouvernement vaincu. Le vainqueur disposait donc des terres par lui occupées comme de son domaine privé. C'est ainsi que George I, roi d'Angleterre, par un acte de cession ratifié le 17 juillet 1715, se fit transmettre le domaine des duchés de Brème, de Vèrden et de Stade par le roi de Danemark qui venait de les enlever en pleine paix à la Suède; car ce fut quelques mois après seulement que la guerre fut déclarée à ce dernier pays! 1) Cette pratique s'est continuée pendant les guerres de l'Empire français au commencement de notre siècle. A l'égard des biens privés des sujets ennemis, le vainqueur se bornait à leur imposer des contributions et des réquisitions, ou à les soumettre aux besoins momentanés d'une marode disciplinée. Enfin les commandants de troupes ont toujours cherché à éviter autant que possible des ravages de propriétés ennemies, en ne les autorisant qu'en des cas exceptionnels.

Si l'on a réussi ainsi dans les guerres de terre à circonscrire le droit de l'occupation dans des limites raisonnables, un système différent, profondément attentatoire au principe de la propriété privée, a prévalu dans les guerres maritimes, ainsi que nous aurons l'occasion de l'expliquer. Il y a même quelques auteurs qui, nous le disons avec regret, professent encore sur les changements que produit la guerre dans les conditions du domaine public et de la propriété privée, certaines théories inconciliables

1) Martens § 277 note b. a cité d'autres exemples. Les auteurs anglais et américains défendent avec opiniâtreté le système par nous condamné. V. Oke Manning § 277 note 6. Wildman II, 9. Halleck, ch. XIX. Il est vrai qu'ils ont en leur faveur l'autorité de Grotius et de Bynkershoek. v. § 131. N. 1 G.

avec la véritable nature des guerres internationales de nos temps. Cependant une conviction plus raisonnable s'est frayé le chemin tant en pratique que dans la littérature y relative.2)

Effets de la conquête sur la condition de la propriété immobilière privée.

§ 133. Quant aux immeubles des sujets ennemis, on est depuis longtemps d'accord sur ce point que l'invasion ou l'occupation ennemie ne produit aucun changement dans leur condition légale et qu'ils ne passent plus, comme dans les anciens temps. entre les mains du vainqueur. Sous ce rapport, les auteurs modernes ne présentent aucune divergence d'opinion. Ils s'ac cordent à dire qu'une prise de possession a besoin d'être ratifiée lors de la conclusion de la paix, ce qui veut dire en d'autres termes que l'occupation est un fait insuffisant.1)

Il en résulte que toutes les dispositions arrêtées par le vainqueur relativement à la propriété immobilière du territoire par lui occupé, n'ont aucune valeur légale, qu'elles ne produisent que des conséquences de fait qui, lors de la reprise, par une application du droit de „postliminie", deviennent caduques.

Ce que nous venons de dire sur la condition de la propriété privée des sujets, s'applique également aux biens privés du souverain dépossédé temporairement. Aussi longtemps que le vainqueur n'aura pas acquis la possession complète du pouvoir suprême, il ne pourra disposer valablement de ces biens, 2) pas plus que de ceux qui font partie des domaines de l'État.") Mais il pourra

2) V. surtout M. Vidari, Del rispetto della proprietà privata. Pavia 1867. et § 139. N. 2 G.

1) Meermann, Von dem Recht der Eroberung. Erfurt 1774. Pufendorf VIII, 6. 20. Vattel III, § 195. 196. Klüber § 256. de Martens § 277. Wheaton IV, 2, § 16. Halleck, ch. XIX, 3. 1. Vidari p. 63. 123.

2) Ainsi jugé par la Cour de Cassation de Paris (Sirey XVII, 1. 217): „Le droit de conquête n'a d'effet au préjudice des princes que sur les biens qu'ils possèdent en qualité de princes, et non sur les biens qu'ils possèdent comme simple propriété."

3) Jugement de la même Cour (Sirey XXX, 1, 280): „La conquête et l'occupation d'un État par un souverain n'autorisent pas ce souverain à disposer par donation ou autrement du domaine conquis ou occupé." V. §§ 188. 189 et aussi Allgemeines Landrecht für die preuss. Staaten. I 9, § 198.

[G. Supposé p. ex. que le fisc eût vendu avant l'occupation une terre appartenant au domaine et dont le prix fût payable à termes, l'État occupant

incontestablement disposer toujours à titre provisoire des fruits et des revenus qu'il aura fait saisir.

n'est pas autorisé à s'approprier les termes échus pendant l'occupation, car ces sommes ne sont qu'une partie du capital et ne peuvent pas être identifiées avec l'argent trouvé dans les caisses publiques. L'État occupant devient pro tempore usufruitier et doit par conséquent éviter toute détérioration ou consommation inutile de la substance dont il a l'usufruit; mais il n'est pas lié au procédé d'exploitation en usage dans le pays. Dans cette matière rentrent aussi les voies ferrées et les lignes télégraphiques, même celles qui sont la propriété des particuliers, car elles peuvent servir aux opérations de la guerre. Mais ici l'État occupant n'a également que le droit d'usufruit et doit restituer le matériel après la conclusion de la paix. Art. 6 du Projet de Bruxelles. Seulement l'État occupant n'est pas obligé, comme le fait croire la fin de l'article, de payer des indemnités à ces particuliers; c'est l'État occupé, comme le fait observer Bluntschli (645), qui peut éventuellement se charger de ce soin. Dans le procès relatif aux 15000 chênes tirés des forêts gouvernementales de la Meurthe et de la Meuse et vendus par les Prussiens pendant l'occupation 1870-72, la question juridique revient uniquement à savoir si cette quantité d'arbres peut passer pour une coupe normale ou doit être regardée comme une consommation de la substance, ce que l'Allemagne elle-même reconnut comme injustifié. Art. 7 du Projet modifié: „l'État occupant devra sauvegarder le fonds de ces propriétés et les administrer conformément aux règles de l'usufruit." Il eût été encore licite d'outrepasser cette règle, si le bois avait été nécessaire pour les opérations militaires, ce que personne ne prétend. (Jahrb. für Gesetzgebung und Verwaltung von Holtzendorff und Brentano I. 2e livraison.) Sont réputées en état de paix les archives, les bibliothèques, les collections artistiques, les églises et les institutions de bienfaisance. Quant aux dernières, c'est le respect de la religion et de l'humanité qui commande de les épargner (le maréchal Davoust se servit en 1813 des églises de Hambourg comme écuries). Les musées et les bibliothèques sont une propriété nationale, dont on ne doit pas disposer dans un but militaire ou hostile. Il en est de même des archives, abstraction faite des pièces qui se rapportent à l'objet de la guerre. Les archives, quoique consistant en objets meubles, sont regardées dans leur totalité comme immeubles et comme appartenance de la souveraineté, les documents des archives servant à établir des droits acquis etc. Il est vrai qu'il n'est pas toujours possible de concilier le respect absolu de ces établissements avec les exigences de la guerre; on peut seulement établir en règle générale, comme le fait l'art. 34 des articles de guerre américains, que ces propriétés ne sont pas des propriétés publiques dans le sens du droit de guerre, qu'il faut éviter particulièrement la dégradation de ces propriétés, comme p. ex. la destruction du Capitole de Washington par les Anglais en 1814, laquelle fut aussi très-sévèrement blâmée au sein du Parlement. Un fait particulièrement contraire au droit international, c'est l'enlèvement de collections entières ou de quelques objets de ces collections, comme le cas s'est présenté sous la république française et sous l'Empire. Le duc de Wellington, dans sa dépêche du 11 sept. 1815, dit que ce procédé était contrary to the practice of Heffter, droit international. 4. éd.

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§ 134.

Choses incorporelles (créances).1)

L'occupation des choses incorporelles a toujours fourni aux auteurs l'occasion d'une controverse importante. Peuvent-elles être occupées ou saisies valablement? La plupart des auteurs 2) se sont prononcés pour l'affirmative, en ce sens que, le débiteur une fois valablement libéré par le vainqueur, le créancier primitif ne pourrait plus se prévaloir à son égard des conséquences résultant du droit de postliminie. Les mêmes auteurs disaient en outre que la libération était valablement faite par le vainqueur, lors même que les débiteurs avaient leur domicile en territoire tiers ou neutre. A l'appui de leur théorie, ils ont invoqué la maxime romaine qui donnait à l'occupation de guerre (occupatio bellica) un caractère absolu. Ils en faisaient descendre une sorte de droit de confiscation, dont on s'est prévalu pendant plusieurs guerres du siècle dernier, pour se faire rembourser le montant des sommes qui étaient dues au gouvernement vaincu. Ils se sont prévalus des dispositions de différents traités de paix qui ont également sanctionné des spoliations semblables. *)

civilized warfare", (Martens, Nouv. Rec. II, p. 648) et Lord Castlereagh dans sa note en date du même jour, adressée aux puissances alliées, demanda la restitution de ces dépouilles, inséparables des pays auxquels elles appartenaient. Le principe de la propriété basé sur les droits des territoires d'où ces chefs-d'oeuvres ont été enlevés est le plus sûr et le seul guide vers la justice" (ibid. p. 643). Le gouvernement français ne répondant pas à la sommation du duc de Wellington, celui-ci lui-même fit enlever du Louvre les objets d'art en question. L'Angleterre restitua spontanément une collection de tableaux destinée à l'Académie des Arts à Philadelphie et trouvée dans un bâtiment pris par un croiseur anglais en 1812, parce que ces objets d'art touchaient aux intérêts communs du genre humain.]

1) Chr. Gottl. Schwartz, De jure victoris in res divictor. incorporales. Alt. 1720. de Kamptz, Beiträge zum Staats- und Völkerrecht. no. 9. B. W. Pfeiffer, Das Recht der Kriegseroberung in Beziehung auf Staats- Capitalien. 1823. Ferd. Ch. Schweikart, Napoleon und die kurhessischen Capitalsschuldner. Königsberg 1833. de Kamptz, Litt. § 307. Ajoutez Vidari, p. 102. [G. C'est à tort que Hall (p. 369) parle à cette occasion de l'affaire de l'emprunt silésien de 1753: Frédéric II n'était pas en guerre avec l'Angleterre, mais il ordonna la séquestration de ces fonds à titre de représailles. V. § 110 note 6.]

2) Wildman II, 11 n'en excepte que les créances d'un État envers des particuliers.

3) Schweikart, loc. cit. p. 74. 82 suiv. cite un grand nombre de traités pareils. V. aussi Bynkershoek, Quaest. jur. publ. I, 7, p. 177. de Kamptz,

Enfin, comme si tant d'arguments ne suffisaient pas, on a encore eu recours à un prétendu arrêt de la Cour amphictyonique. Il s'agissait alors d'une demande formée par la ville de Thèbes contre le peuple thessalien et dont elle aurait été déboutée après qu'Alexandre le Grand eut fait remettre à ce peuple le document original, lors de la destruction de la ville. 4)

Quoi qu'il en soit, nous croyons, au point de vue légal, devoir combattre cette doctrine, ainsi que la jurisprudence à laquelle elle a servi de base. C'est en effet un principe élémentaire que le payement fait à un autre qu'au vrai créancier, ou que la libération d'un tiers ne fait pas régulièrement cesser les droits du créancier. Pour se rendre compte d'une manière suffisante de l'état de la question, il faut distinguer premièrement des créances purement personnelles les obligations qui dérivent de droits réels, sans en former précisément la partie principale. Car celles-ci participent de la nature des immeubles et elles en partagent le sort pendant la guerre, conformément aux règles précédemment retracées par nous.

Parmi les créances d'un caractère personnel, nous remarquons d'abord celles qui ont pour but de fournir un équivalent de certains immeubles concédés à titre d'usage, comme les loyers et les fermages. Ces derniers appartiennent incontestablement à l'ennemi dès qu'il s'est mis en possession des immeubles. C'est à lui de décider s'il veut maintenir les baux: dès qu'il n'en a pas disposé autrement, ces baux sont censés être tacitement continués entre lui et les fermiers précédents. 5) Mais quant aux autres créances personnelles, ce serait peu conforme à leur vraie nature, que de les regarder comme étant susceptibles d'une possession réelle, par suite d'une occupation de guerre (occupatio bellica). La simple détention d'un titre, ne

Beitr. § 5 note 4. En général les exemples cités par ces auteurs contiennent des conventions faites en prévision de cas spéciaux et qui n'ont aucun caractère général.

4) Cette histoire est racontée par Quintilien, Instit. orat. V, 10. 111 suiv. Les auteurs ont traité cette question avec une certaine prédilection; v. Schweikart p. 53 suiv. L'arrêt en question n'est probablement qu'une pure fiction. V. SaintCroix, Des anciens gouvernements fédératifs p. 52. F. W. Tittmann, Ueber den Bund der Amphictyonen. 1812, p. 135. On ignore jusqu'aux termes de ce jugement, qu'on a essayé de recomposer d'après le passage sus-indiqué. 5) Ziegler, De juribus majest. I, 33, § ult.

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