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CHAPITRE Io.

But et division de l'ouvrage.

Belgicam è Belgica tollunt.

On veut faire disparaître la Belgique de la Belgique.

JUSTE-LIPSE, lettre de 1597, à Kilian.

Depuis trente ans, dans notre Belgique partagée en deux idiomes, de rudes assauts ont été livrés à la langue flamande: bien des bouches, bien des plumes ont demandé, ont prédit, ont proclamé sa mort. Mais aussi des voix courageuses et inspirées par un patriotisme plus sage, se sont élevées contre ces vœux imprudents, contre ces sinistres prophéties. Dans ce long débat, on a apporté, d'un côté, tout ce que les préventions et les préjugés, joints à une sigulière ignorance de la matière en litige, peuvent suggérer de mauvaises raisons; de l'autre, on a fait valoir toutes les solides considérations que fournissent en abondance une connaissance approfondie du sujet et la conviction que lon s'arme pour la défense d'un droit sacré. Des deux parts même véhémence, car à cette discussion les passions politiques se sont mêlées plus qu'il ne convenait. De nos jours, la lutte dure encore, mais poursuivie avec moins d'emportement, et constatant de plus en plus la force et les progrès de la cause naguère opprimée et l'affaiblissement de la ligue qui s'était formée contre elle.

A cette lutte, à laquelle, d'ailleurs, nous n'étions pas restés complètement étrangers, nous venons prendre aujourd'hui une part plus directe, mais en plaçant la question, comme doit être placée toute question intellectuelle et sociale, en dehors et au-dessus des intérêts éphémères des partis. Belge flamand, admirateur sincère de notre langue maternelle, ayant longtemps parcouru le facile chemin qu'elle fraie vers les langues et les littératures du Nord, nous croyons de notre devoir d'offrir à nos compatriotes le fruit de nos études particulières et de notre expérience personnelle. Ce n'est pas que nous songions à reprendre en sous-œuvre ni même a résumer le procès ancien: nous regardons comme épuisés presque tous les points du débat, et n'avons pas la présomption de refaire

les savants plaidoyers écrits par M. Willems et par d'autres habiles défenseurs de la langue flamande. Mais dans la question si longuement et si orageusement discutée, il est une face que ces hommes instruits n'ont pas traitée ou qu'ils se sont contentés de signaler en passant: c'est celle-là que nous nous proposons d'examiner avec les développements qu'elle comporte.

Il fleurit en Europe une dizaine de langues qui ont avec la nôtre des rapports tels qu'à l'aide du flamand bien su, on peut acquérir l'intelligence de toutes au bout de quelques jours ou de quelques semaines ou de quelques mois, au plus, suivant le degré d'affinité de chacune d'elles avec notre idiome : voilà la thèse que nous entreprenons de défendre et de prouver dans ce livre.

Ces langues similaires au flamand sont le hollandais, le basallemand (plattdeutsch) le haut-allemand, l'anglais, l'écossais, le frison, le danois, le norvégien, le suédois et l'islandais. Disons néanmoins que notre assertion ne s'applique à l'anglais que pour autant que l'on joigne à la connaissance du flamand quelques notions de la langue française; disons aussi que nous n'entendons pas soutenir qu'il suffit de bien posséder le flamand pour acquérir en peu de jours la prononciation de l'idiome de la Grande-Bretagne.

Hâtons-nous d'ajouter, car nous ne voulons compromettre la cause de la vérité et de la justice par aucune exagération, que nous bornons l'avantage de la connaissance approfondie du flamand à la possibilité de se donner la prompte intelligence, et non pas la connaissance instantanée, intime, complète, de toutes les langues congénères. Autre chose est de comprendre seulement un idiome étranger, autre chose de le posséder de manière à le parler et à l'écrire comme une seconde langue maternelle. Et toutefois l'avantage que nous préconisons est immense encore : la plupart des langues septentrionales ont produit des littératures magnifiques, et certes, il est éminnemment avantageux pour un peuple de pouvoir, presque sans efforts, participer aux richesses littéraires de plusieurs autres nations. C'est là une de ces vérités que l'on prouve en les énonçant.

D'un autre côté, ceux qui, ayant déjà l'intelligence d'une langue étrangère, éprouveraient le désir ou le besoin de se l'approprier entièrement, seraient placés bien avant sur la bonne voie et ils pourraient en très peu de temps atteindre le but désiré.

Ceux de nos compatriotes flamands qui s'opiniâtrent à repousser ou à négliger la langue de leur enfance, oublient ou igno

rent quel trésor ils dédaignent : nous venons le leur rappeler ou le leur apprendre. Non pas que nous voulions transformer en polyglottes tous les Belges de la Flandre et du Brabant; cette qualité n'est désirable que pour les hommes de science et pour ceux à qui une grande fortune fait de grands loisirs, bien que l'acquisition de l'intelligence de toutes les langues d'origine teutonique soit à la portée des Flamands de tous les états: mais nous disons que le flamand devrait être tenu en haute estime et cultivé par la majorité de nos concitoyens, lors même qu'il ne servirait qu'à faciliter, à ceux qui le savent, l'étude de l'anglais et de l'allemand.

Or, nous démontrerons à l'évidence que cette étude, longue et pénible quand elle se fait par l'intermédiaire du français, devient extraordinairement facile à l'aide du flamand. Cette considération ne suffira pas peut-être pour désarmer toutes les hostilités, pour dissiper toutes les préventions; mais il est permis de penser qu'elle fera quelque impression sur l'esprit des hommes appelés à diriger la marche morale et intellectuelle de la Belgique. Depuis quelques années, dans notre pays comme dans le reste de l'Europe, on attache plus de prix à la culture des langues vivantes : aussi dans la Belgique flamande, presque point de colléges ou de pensionnats qui n'aient leurs cours d'allemand et d'anglais; mais partout, dans ces établissements, les deux langues s'enseignent en prenant le français pour point de départ et de comparaison. C'est un usage étrange, absurde; voici a peu près à quoi il équivaut: des habitants de Gand ou de Bruges ont à se rendre à Londres : ils pourraient avoir une traversée rapide en s'embarquant à Ostende, mais ils sont pressés d'arriver et, pour gagner plus promptetement leur destination, ils se mettent à traverser toute la France et vont s'embarquer à Marseille. Un des résultats de cet ingénieux détour c'est que plusieurs n'atteignent jamais le terme de leur voyage. Pour le voyage en Allemagne, détour plus long encore et résultats tout aussi satisfaisants.

C'est, comme nous l'avons dit, une absurde pratique. Pour peu qu'elle se prolonge encore dans nos provinces, il y a là de quoi nous livrer à la risée de l'Europe savante. Ne se rencontrera-t-il personne parmi nos hommes d'état pour nous sauver de ce ridicule, pour faire triompher les droits du bon sens, en introduisant aux écoles, qui, dans la Belgique flamande, relèvent de l'autorité supérieure, l'enseignement de l'allemand et de l'anglais d'après la comparaison avec la langue sœur, le flamand? Une

division. Cependant, comme, au milieu des nombreux points de contact qu'ils conservent, ils offrent aussi des caractères particuliers constituant des différences assez marquées pour les partager en classes distinctes, il vaut mieux admettre une division moins générale et dédoubler la seconde branche. On range ainsi toute la famille en trois grandes classes: le haut-allemand, le bas-allemand (niederdeutsch) et le scandinave.

Le haut-allemand ou allemand littéraire est seul dans sa branche, eu égard aux temps modernes. On le divise, par rapport à son état ancien, en vieux haut-allemand (alt hochdeutsch) et en haut-allemand moyen (mittel hochdeutsch).

Le niederdeutsch (Fl. nederduitsch) se subdivise en hollandais, flamand et plattdeutsch, trois dialectes très rapprochés d'un seul idiome. Au fond, et dans leurs formes écrites, le hollandais et le flamand ne forment qu'une seule langue, que l'on peut désigner par le mot nederlandsch, qui ne peut se traduire que par néerlandais, terme auquel la passion politique est parvenue à attacher une idée de mépris. Au nederduitsch se rallient aussi, mais moins intimement, l'anglais et l'écossais (lowland schotch). Les rameaux anciens de cette branche sont le frison, le vieux saxon et l'anglo

saxon.

Le francisque ou idiome des Francs est trop peu connu pour le classer avec certitude. C'était un amalgame de dialectes mêlés comme les peuples qui formaient la redoutable confédération de la Germanie. Le caractère haut-allemand parait cependant avoir fini par y dominer.

Le gothique, du moins le méso-gothique, est mieux connu, mais on n'est pas plus d'accord sur la classification qu'il convient de lui donner. Nous voyons les savants le relier tour à tour à chacune des trois grandes branches du teuton: cela provient de ce que par certains points il touche à toutes les trois. Nous sommes de l'avis de ceux qui le rangent de préférence dans la classe du nederduitsch.

La troisième branche, ou le scandinave, comprend le danois, le suédois, le norvégien et l'islandais.

Les trois premiers dialectes s'éloignent plus ou moins de l'ancien scandinave (danska tunga), qui se parlait aussi dans le Groenland, dans les îles Ferröe, Shetland, Orcades, etc., et qui s'est conservé, à de légères modifications près, dans l'islandais de nos jours.

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