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En résumé, une dotation sensiblement plus élevée que la dotation actuelle nous paraîtrait s'imposer au profit du fonds de colonisation à l'effet d'augmenter les réserves domaniales en vue de lotissements à établir pour des colons français. Pourvue d'une dotation initiale suffisante, la caisse de colonisation serait ensuite alimentée par la vente régulière des terrains.

Mais la vente devrait-elle continuer à être le seul mode d'aliénation des terres domaniales au profit des colons français ? Des réclamations ardentes s'élèvent pour demander que l'on accordent en Tunisie, comme on l'a fait en Algérie, des concessions gratuites. Le système des concessions gratuites amènerait certainement un afflux de colons français dans la Régence, mais quels colons? Les expériences tentées à cet égard en Algérie n'ont pas donné des résultats de nature à encourager le renouvellement des mêmes moyens de colonisation. Heureusement, entre la concession gratuite et la vente obligeant l'émigrant à se dessaisir immédiatement d'une partie de son capital, alors que toutes ses ressources lui seraient nécessaires pour la mise en valeur de sa propriété, la législation tunisienne nous offre une solution intermédiaire, celle de l'enzel. La loi de 1885 définit l'enzel « une propriété foncière grevée d'une rente perpétuelle ». Quiconque n'a pas par devers lui des capitaux suffisants pour devenir d'ores et déjà propriétaire incommutable peut, en qualité de locataire perpétuel, se procurer, en fait, tous les avantages de la propriété moyennant le payement d'une rente annuelle très modérée, représentant à peu de chose près l'intérêt de l'argent qu'il eût fallu emprunter pour acquérir un immeuble par la voie ordinaire; mais tandis qu'il eût fallu rembourser le capital emprunté à une échéance déterminée, la durée de la possession de l'enzéliste est illimitée. Que l'on stipule pour lui la faculté de racheter, à un prix fixé au moment de la constitution légale du contrat, la rente perpétuelle contractée par lui, et de devenir propriétaire incommutable, il aura la sécurité absolue au point de vue de ses entreprises et pourra, dès le début de son exploitation, prévoir l'époque probable à laquelle il deviendra, par le rachat, propriétaire du domaine dont il aura la libre disposition; il aura la certitude de pouvoir laisser à ses ayant-droit le fruit de son travail. C'est ainsi, nous l'avons vu, que procèdent les Italiens; des sociétés se forment, qui achètent de vastes domaines ; ces domaines sont ensuite morcelés et vendus ou donnés à enzel à de petits cultivateurs. Les sociétés retirent un intérêt suffisamment rémunérateur du capital qu'elles ont engagé et la petite colonisation se développe. Tandis que nous ne possédons guère que des fermes isolées, les Italiens peuplent des villages. Pourquoi ne pas nous inspirer de leur exemple et ne pas appliquer les mêmes procédés?

Enfin, souvenons-nous que, si nous voulons que des Français s'établissent en Tunisie, il est indispensable d'y organiser des centres, d'y créer des villages. Le paysan français n'aime pas à vivre dans l'isolement. En Tunisie, il y est condamné à l'heure actuelle. Il faut que l'Etat, après avoir déterminé les régions les plus propres à la prospérité de centres de colonisation, prenne à sa charge l'aménagement des voies d'accès, l'adductiou des eaux, la construction des édifices nécessaires au fonctionnement des services publics et de la vie communale.

Le choix de l'emplacement où devront s'élever les villages appellera de la

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part de l'Administration une étude approfondie. Il sera essentiel que l'emplacement choisi soit salubre, afin que la race colonisatrice puisse s'y implanter et y faire souche; il sera non moins indispensable que la terre y soil fertile, afin que les colons y soient rémunérés de leurs peines. Autant que possible, la terre défrichéé à l'avance ou facile à défricher, devra être propre à une grande diversité dans la culture. La monoculture a amené la ruine de beaucoup d'agriculteurs. Plus le colon pourra varier ses cultures, plus il aura chance de réussir.

Enfin, les centres de colonisation devront renfermer des points où l'on soit sûr de trouver de l'eau saine en quantité suffisante pour satisfaire largement aux besoins des colons et à ceux de leurs animaux.

Les lerres pouvant remplir actuellement ces conditions se trouvent surtout sur les versants des côleaux qui entourent la vallée de la Medjerda et dans les régions de Bizerte et du. cap Bon.

Les points insalubres de cette zone devront être éliminés avec soin. Tout d'abord restreinte aux stations les plus proches des voies de communication les premières établies et des centres de quelque importance, les premiers créés, la colonisation ferait « tache d'huile » et s'étendrait en zones progressives en suivant le tracé des routes et des voies ferrées.

Signalons à ce sujet un moyen de peuplement français indiqué par MM. Saurin et Pensa, qui ne serait pas à négliger. « Que l'entretien des voies ferrées, disent-ils, soit confié à des Français exclusivement; que chaque maisonnette de garde puisse devenir le centre d'un groupement français et, en comptant le personnel nécessaire à un réseau ancien de 315 kilomètres de voie large et de 611 de voie étroite et un nouveau réseau de 600 kilomètres, c'est 1.000 à 1.100 petits groupements français réalisables. » Les centres fran- · çais devraient surtout être créés auprès des colonies siciliennes, de manière à pouvoir mieux les surveiller et à faciliter leur assimilation par l'installation d'écoles françaises.

Cet ensemble de mesures aurait pour complément, dans notre pensée, l'institution d'un Crédit foncier destiné à permettre aux agriculteurs de se procurer à bon compte l'argent nécessaire aux exigences croissantes de la mise en culture, et un développement assez large des libertés locales pour donner aux Français le sentiment qu'ils ne sont pas sur une terre étrangère, qu'au point de vue des droits de l'homme et des franchises du citoyen, la Tunisie est le prolongement de la mère-patrie.

Telles sont, Messieurs, les considérations qu'il nous a paru utile de soumettre à la Chambre en ce qui concerne la nécessité urgente de favoriser le peuplement français dans la Régence. Nous ne croyons pas que nous ayons envisager l'hypothèse du voisinage de l'Italie dans la Tripolitaine. Si désireux que nous soyons de resserrer les liens d'entente cordiale avec une nation vers laquelle nous attirent, tout à la fois, et les affinités de race et le souvenir de ce que nous avons fait pour conquérir son indépendance, nous ne saurions oublier que l'Italie à Tripoli, ce serait l'Italie maîtresse de pénétrer au cœur du continent noir et de menacer la Tunisie. Nous pouvons, sans en prendre ombrage, entrevoir pour l'avenir l'action de l'Italie dans l'ancienne Cyrénaïque ou pays de Barca. Nous ne pouvons admettre un seul instant que, sous pré

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texte d'assurer la liberté de nos mouvements à l'ouest de nos possessions algériennes, notre diplomatie commette l'imprudence de remplacer, à notre frontière orientale, le voisinage d'un empire à son déclin par le voisinage immédiat d'une puissance militaire européenne active, entreprenante, et faisant partie de la Triple-Alliance; mais la crainte seule d'une pareille éventualité, si peu vraisemblable que nous la voulions supposer, ne serait-elle pas une raison de plus pour nous faire considérer l'extension de la colonisation française en Tunisie comme étant au premier chef, à l'heure actuelle, une question d'intérêt national?

(MINISTÈRE DES COLONIES)

Rapport fait par M. Bienvenu Martin, Député, au nom de la Commission du Budget chargée d'examiner le projet de loi portant fixation du Budget général de l'exercice 1903.

MESSIEURS,

Avant d'aborder l'examen du budget colonial. nous voudrions dire quelques mots des modifications apportées au cours de l'année 1902, dans l'organisation politique et administrative de nos colonies, résumer les progrès réalisés dans le développement de leur outillage économique, présenter le tableau de leur mouvement commercial pendant le dernier exercice.

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Dans l'ordre politique et administratif, la mesure la plus importante à signaler est le décret du 1er octobre 1902, qui a réorganisé le gouvernement général de l'Afrique occidentale française.

La création de ce gouvernement remonte au décret du 16 juin 1895, qui a placé sous une même direction politique et militaire les territoires du Sénégal, du Soudan français, de la Guinée française et de la Côte d'Ivoire. Le Dahomey récemment conquis et son hinterland restaient en dehors de sa sphère d'action. Ils lui furent rattachés par le décret postérieur du 17 octobre 1899; ce dernier acte opéra en même temps ce qu'on a appelé la dislocation du Soudan, c'est-à-dire qu'il supprima cette colonie jusque-là autonome pour en répartir les différents cercles entre le Sénégal, la Guinée, la Còte d'Ivoire et le Dahomey; il laissa subsister seulement deux territoires militaires rattachés au gouvernement général.

Mais en dépit des décrets de 1895 et de 1899, le gouverneur général n'exerçait, en dehors du Sénégal et du Soudan, qu'une direction restreinte sur les colonies soumises à son autorité. La Guinée, la Côte d'Ivoire et le Dahomey continuaient, au point de vue administratif et financier, de relever exclusivement de la métropole; leurs gouverneurs correspondaient directement avec elle, lui rendaient compte de leurs actes, en recevaient leurs instructions. Isolé dans sa colonie du Sénégal, le gouverneur général n'avait, en dehors des

questions politiques et militaires proprement dites, qu'une action nominale et décoratives sur les autres parties de son gouvernement. Il restait étranger à leurs affaires, n'intervenait point dans leur gestion intérieure, ne s'occupait ni de leurs budgets, ni des questions concernant leur développement économique. Il ne disposait d'aucunes ressources pouvant être affectées à des dépenses d'intérêt général. Le décret du 1er octobre 1902 a modifié ce régime ou plutôt il a créé un régime nouveau dont voici les traits essentiels :

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Désormais le gouverneur général aura seul le droit de correspondre avec le gouvernement métropolitain; il cesse de cumuler ses fonctions avec celles du gouverneur du Sénégal. Il est assisté d'un socrétaire général et d'un conseil de gouvernement, Il réside à Dakar. Chacune des colonies du Sénégal, de la Guinée, de la Côte-d'Ivoire et du Dahomey est administrée, sous l'autorité du gouverneur général, par un lieutenant-gouverneur. Les pays de protectoral actuellement dépondants du Sénégal et les territoires du Haut-Sénégal et du Moyen-Niger sont groupés en une unité administrative et financière nouvelle, sous le nom de « Territoires de la Sénégambie et du Niger » et administrés directement par le gouverneur général.

Les colonies et territoires composant le gouvernement général de l'Afrique occidentale française conservent leur autonomie administrative et financière; leurs budgets sont arrêtés par le gouverneur général et approuvés par décret. Quant aux dépenses du gouvernement général, du contrôle, des directions générales, qui pourront être instituées, des services communs et d'intérèt général, elles sont inscrites dans une section spéciale du budget de la Sénégambie et du Niger; ce budget est alimenté par les recettes perçues dans ces territoires et par des contributions versées par les quatre colonies et dont le montant est fixé annuellement par le gouverneur général.

Telle est l'organisation nouvelle. Elle est calquée sur celle de l'Indo-Chine; il y manque toutefois, pour que l'assimilation soit complète, un budget général. Nous ne regrettons pas qu'on ait ajourné cette création; elle serait, à notre avis, tout au moins prématurée; nos jeunes colonies de la Guinée, du Dahomey et de la Côte-d'Ivoire sont en pleine période d'expansion; elles ont des finances bien assises; elles consacrent une partie de leurs recettes à de grands travaux et spécialement à la construction de voies ferrées qui faciliteront leur mise en valeur et l'exploitation de leurs richesses naturelles. On peut dire qu'elles se suffisent à elles-mêmes. Pourquoi leur enlever la liberté de disposer de leurs ressources qu'elles ont bien employées jusqu'à présent ? L'établissement d'un budget général auxquelles elles devraieent verser une part notable de leurs revenus n'ajouterait pas grand' chose à leur vitalité et risquerait de paralyser leur initiative en restreignant leurs moyens d'action. Une pareille mesure rencontrerait d'ailleurs à l'heure actuelle des difficultés d'application dans la diversité de régime qui existe tant au point de vue douanier qu'au point de vue fiscal entre ces différentes possesions.

Mais le décret du 1er octobre 1902 décide, et ce suffit quant à présent, que celles-ci contribueront dans une proportion fixée chaque année, aux dépenses communes et d'intérêt général. Quelles seront ces dépenses? Il y aura d'abord les frais de peronnel du gouvernement général, qui pourraient être considérables si l'on dotait immédiatement le gouvernement de tous les services qu'il

peut comporter avec des directeurs généraux à la tête de chacun d'eux. Il faut prévoir aussi la construction d'un hôtel du gouvernement à Dakar. C'est souvent le premier résultat des réformes de se traduire en des créations d'emplois plus ou moins nombreux. Pour le moment, le gouvernement général a su éviter cet écueil. Il n'a autour de lui que quelques collaborateurs indispensables.

Il y aura encore les dépenses des travaux publics entrepris par le gouvernement général. Il est permis de supposer que l'exécution d'un programme de grands travaux a été une des raisons déterminantes du décret du 1er octobre 1902. L'organisation qu'il a édictée, permet assurément une plus large initiative et des conceptions d'ensemble que des colonies isolées n'auraient pu embrasser et que cependant la connexité de leurs intérêts, la communauté de leur hinterland, leurs rapports de voisinage, rendent aujourd'hui nécessaires. Elle augmente puissamment leur crédit et leur donne ainsi le moyen de réaliser à des conditions meilleures des entreprises importantes Les grands emprunts deviennent plus faciles.

Mais, si c'est là un des principaux avantages du groupement plus étroit des colonies de l'Afrique occidentale, il faut convenir que là aussi, peut en être le danger.

Le Gouverneur général a inauguré ses nouvelles attributions par un projet d'emprunt qui témoigne de son activité et de son discernement des besoins des territoires qu'il' a à administrer. Cet emprunt, dont nous n'avons pas à examiner ici les conditions, encore incertaines d'ailleurs, et destiné à l'exécution d'un programme de grands travaux, dont nons dirons un mot plus loin, serait contracté pour le compte et au profit des colonies appelées à en bénéficier et le service en serait assuré par des prélèvements sur les contributions annuelles des diverses colonies. Il y aura donc à répartir entre elles les travaux à exécuter au moyen de l'emprunt, d'une part, et d'autre part, les annuités d'amortissement qui en sont la contre-partie. Cette répartition des profits et des charges demandera beaucoup d'équité et de mesure. Il ne faut pas qu'il y ait des régions sacrifiées même momentanément; autrement la réforme opérée retarderait leur développement. Il faut se garder aussi d'une centralisation excessive que pourrait contrarier la vie propre de jeunes colonies qui sous le régime de l'autonomie, ont montré quelles étaient en état de de se suffire à elles-mêmes et de progresser.

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L'organisation du Congo a été elle aussi remaniée. Par le décret du 5 juillet 1902 tous les territoires dépendant du Congo français sont placés sous l'autorité du commissaire général du Gouvernement; la région du Tchad cesse de constituer un territoire militaire distinct, pourvu d'un commissaire du gouvernement spécial; elle sera désormais administrée par un administrateur relevant directement du commissaire général du Congo, mais recettes et ses dépenses continueront de former un budget autonome. Le commissaire général siège à Libreville; il est assisté d'un lieutenant-gouverneur dont la résidence est à Brazzaville. En même temps, il lui est adjoint un commissaire chargé spécialement d'étudier les questions économiques et de représenter l'administration dans ses relations avec les sociétés concessionnaires.

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